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Pédophilie

Dimanche 2 mai 2010

Pédophilie

La pédophilie désigne une préférence sexuelle d’un adulte envers les enfants prépubères ou en début de puberté. Un pédophile est une personne éprouvant ce type de préférence.
Selon le critère de l’OMS, les adolescents de 16 ou 17 ans sont aussi classés comme pédophiles, s’ils ont une préférence sexuelle persistante ou prédominante vers les enfants prépubères au moins cinq ans plus jeunes qu’eux.
Dans la plupart des sociétés modernes, ce type de préférence est considéré comme une perversion sexuelle (paraphilie) et les activités s’y rapportant sont condamnées par la loi. Les passages à l’acte de pédophiles, soit les relations sexuelles entre un adulte et un enfant au-dessous de la majorité sexuelle constituent, juridiquement, des atteintes sexuelles sur mineur ou des agressions sexuelles sur mineur.
La pédophilie est classée comme trouble de la préférence sexuelle (maladie mentale) par la classification internationale des maladies (CIM) et comme paraphilie par le manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux (DSM).
Le mot pédophilie est formé sur les radicaux grecs paidos de παις-παιδος, enfant et philia de φιλία, amitié. Le sens étymologique du mot conduit donc à l’amitié pour les enfants. En fait, le mot pédérastie conviendrait mieux au sens actuel donné au mot pédophilie, puisque pédérasitie est formé des deux radicaux paidos (enfant) et eros (amour sexuel).
L’expression« pédophilie érotique », traduite de l’allemand, a été proposée par le Dr A. Forel en 1906. Par la suite, on a abrégé en pédophilie, et le pédophile est devenu, à côté des grandes figures du pédéraste, du sodomite et de l’inverti, un type mineur d’homosexuel. Le mot est réapparu en 1968 et dérive du nom commun « pédophile » (fin XIXe), qui lui-même provient du néologisme « pedophilia erotica » proposé par le psychiatre autrichien Richard von Krafft-Ebing en 1886 dans son ouvrage Psychopathia Sexualis pour qualifier une attirance sexuelle envers les personnes impubères ou en début de puberté qui domine la sexualité d’un individu sa vie durant.
Si le mot pédérastie existe depuis 2 500 ans, le mot français pédophilie date de 1906.
Il a été diffusé par un courant sociopolitique post-soixante-huitard, proche de « l’éducation alternative », et qui réfléchissait sur la place de l’enfant dans la société et les relations adultes-enfants. On y trouvait des sociologues, des philosophes, des architectes, des écrivains, des éducateurs, des enseignants, des médecins, qui avaient en commun une curiosité pour les organisations sociales qui mettaient l’enfance au centre de leurs préoccupations.
Malgré une absence de tabous , ce courant intellectuel a voulu se démarquer de la pédérastie, et évacuer la dimension sexuelle des relations adultes-enfants. Il a donc inventé le mot « pédophilie » qui, comme dit dans la définition étymologique, vient du grec « paidos », « enfant » et « philein », « aimer ».
Ce petit cercle intellectuel ne pouvait maintenir longtemps le sens sémantique du mot pédophilie dans sa stricte étymologie. Dès que la langue vernaculaire a adopté ce mot, elle en a fait l’équivalent de « pédérastie », réintroduisant une dimension sexuelle que ses créateurs voulaient justement exclure. L’usage a rapidement adopté ce sens nouveau, qui avait l’avantage de ne plus faire référence à la pédérastie culturelle grecque, et qui faisait plus moderne.
Le mot a eu un certain succès dans diverses publications savantes des années 1980, notamment auprès des psychiatres (qui voyaient ressurgir là la « pedophilia erotica » de la classification de Richard von Krafft-Ebing au XIXe siècle), en particulier dans la communauté scientifique québécoise, qui en a fait grand usage. Il permettait de parler des relations sexuelles adultes-enfants comme d’une perversité médicale contemporaine, coupée de toute antériorité culturelle.
Repassé dans le langage courant par ces publications, les médias s’emparaient du vocable dans les années 1990, pour qualifier les affaires judiciaires de mœurs entre adultes et enfants. Les médias utilisèrent largement la déclinaison « pédophile », pour qualifier les prévenus concernés.
Vu la gravité des affaires judiciaires de ces dernières années (entre autres les cas Dutroux, Fourniret…), le mot « pédophile » a aujourd’hui pris le sens sémantique courant de « violeur d’enfants », voire d’assassin. Il est largement usité par les médias. Quant à la « pédophilie », la compréhension courante du mot aujourd’hui associe le champ des relations adultes-enfants, et celui de la contrainte sexuelle sur autrui, qu’il s’agisse de sollicitation, de viol ou de meurtre.
Par ailleurs, des dérives dans l’emploi du terme tendent à s’appliquer à ce qui relève en fait de la pédérastie dans des affaires judiciaires ou médiatiques concernant des adolescents pubères.
Loin de leur origine, le mot « pédophilie » – et sa déclinaison « pédophile » – sont aujourd’hui du registre du vocabulaire médiatico-judiciaire. Dans beaucoup de législations le terme « pédophilie » n’est pas utilisé pour qualifier un crime ou un délit. Par exemple, en droit français il ne figure dans aucun texte de loi. (La position de la justice vis-à-vis des différentes réalités auxquelles peut se référer ce terme est précisée plus bas.)
Les deux termes sont également utilisés par des groupes de pression pour faire valoir leur point de vue dans un contexte émotionnel très fort. Cet écho renforce soit le sens de contrainte sexuelle sur l’enfant et souligne les aspects néfastes de la pratique pédosexuelle sur l’enfant. D’autres groupes plus libéraux voient au contraire un bienfait pour l’enfant et militent pour une reconnaissance de ce principe. Selon eux, le problème est mal étudié et relève de trop de présupposés moraux et sociaux discutables à leur goût. La sérénité du débat serait aveuglée par une législation aveugle et des comportements viscéraux.
Les milieux médicaux considèrent que la pédophilie relève de la maladie, de la déviance, de la perversité, en un mot de la psychiatrie, et peut-être du soin. Il s’agit de la thèse la plus reprise dans le discours psychiatrique sur le sujet.
Des associations diverses s’emploient, par une prévention auprès des enfants, et en demandant aux législateurs d’intensifier la lutte contre la pédophilie.
Viol sur mineure illustré par Martin Van MaeleLa pédophilie rassemble en psychiatrie tout ce qui a trait aux relations sexuelles adultes-enfants. Elle peut être hétérosexuelle, homosexuelle, ou mixte. Elle concerne des hommes comme des femmes de tous âges. Elle peut coexister avec une sexualité par ailleurs normale de l’adulte en cause, ou s’associer à une impuissance, une anomalie anatomique. Elle peut s’exercer au sein des familles, souvent dans le cadre de relations incestueuses, ou dans le cadre d’une fréquentation usuelle des enfants, comme l’école, les mouvements de jeunes — ce que les psychiatres appellent des « structures facilitantes », mais aussi au hasard des rencontres.
Elle ne fait pas forcément l’objet d’un passage à l’acte. Le simple désir de relations sexuelles avec un enfant, même frustes, entre dans le cadre de la pédophilie. Elle peut aussi dépasser le cadre de relations purement sexuelles, et s’associer à des vexations, des atteintes à la personne, voire des meurtres. Elle peut être un acte isolé, ou une habitudeEn tous cas, elle se manifeste à la société par un désir ou un acte transgressif qui ne respecte pas la norme. L’adulte qui désire ou commet ce raptus social a en principe conscience de la gravité de son désir ou de son acte, du fossé creusé avec le reste de la société, du renvoi à sa marginalité, son isolement.
La conscience de cette transgression – potentielle ou réelle – est le plus souvent une culpabilité douloureuse, et entraîne chez l’adulte des mécanismes de résolution variés sur le mode névrotique.
Dans le cas du pédophile névrosé, on peut distinguer :
Le pédophile peut ne jamais passer à l’acte, retenu par la conscience de l’interdit ou la peur de la répression, se contenter d’images ou de fantasmes érotiques. S’installe alors progressivement une dépression, résolutive de la mauvaise conscience et de la tension psychologique que leur inspire leur sentiment de culpabilité. Ils peuvent alors demander spontanément l’aide de la psychiatrie pour partager leur fardeau et s’en débarrasser, ou enfin trouver une résolution plus définitive de leur contradiction intérieure dans le suicide ou le passage à l’acte;
Certains pédophiles peuvent fonder leurs fantasmes sur des images enfantines très diverses : cela peut aller de la simple photographie d’enfant classique à la pornographie, en passant par des photographies familiales à la plage parfois « naturiste », des photographies de catalogues pour vêtements d’enfants, des reportages sur des peuplades où les enfants vivent nus, ou encore des représentations artistiques parfois suggestives. Cette consommation d’images masturbatoires peut devenir une compulsion obsessionnelle et maladive .
Enfin, certains pédophiles peuvent chercher une sublimation de leurs désirs dans des dérivatifs sociaux, culturels, artistiques ou pédagogiques.
Parfois le passage à l’acte est circonstanciel, et l’adulte n’a nullement cherché à réunir les conditions de ce passage à l’acte. Il s’est simplement laissé aller, sans avoir spécialement conscience de désirs pédophiles,  » dérapant  » devant un enfant dont il pouvait interpréter l’attitude comme séductrice et la relation une fois consommée (généralement de simples attouchements dans ces cas-là), l’adulte prend brutalement conscience de ce qu’il vient de commettre. Une tendance préalable à la pédophilie est très probablement en cause.
Certains adultes n’iront pas plus loin et le silence retombera sur ce qui est probablement le cas le plus banal, le plus répandu et le plus discret de relations pédophiles, dont la publicité ne dépassera pas le cercle familial. Ces relations isolées ne sont pas systématiquement mises en évidence comme constitutives de traumatismes psychologiques graves pour l’enfant, elles sont souvent de découverte fortuite ultérieure .
L’acte commis, l’adulte peut aussi le nier à sa conscience, souvent par des constructions mentales qui visent à accréditer la thèse d’un désir de l’enfant ou d’un consentement supposé, visant à requalifier l’acte comme normal et naturel (« je n’avais pas conscience de faire du mal »). Ainsi justifié, l’acte pédophile peut se reproduire sans aucune mauvaise conscience, voire avec l’idée (assez fréquente) que cela « fait du bien à l’enfant » .
Il existe par ailleurs des structures de personnalité, notamment perverses (au sens psychiatrique), très différentes des cas ci-dessus. Il s’agit de sujets qui n’intègrent pas les interdits sociaux ou qui les contestent. L’acte pédophile peut être un moyen de transgression sociale, volontaire et délibérée, il est revendiqué .
Ces pédophiles ont souvent un discours parfaitement structuré, voire prosélyte, pour justifier leur conduite, présentée comme éducative et saine pour l’enfant. Le pervers pédophile recherche volontairement la relation sexuelle avec un ou des enfants, parfois de façon systématique en passant des uns aux autres au fil du temps ou en entretenant des relations avec plusieurs enfants en même temps .
Enfin, en dehors des pédophiles présentant une personnalité névrotique, psychotique ou perverse, il existe aussi des pervers sadiques, capables d’atteintes physiques graves envers les personnes, voire de meurtre. Peu d’entre eux s’attaquent aux enfants, même si les cas de ce genre provoquent une émotion considérable, ils restent en réalité exceptionnels. Les psychiatres les considèrent d’abord comme des psychopathes, auteurs de crimes sexuels (Marc Dutroux), pas comme des pédophiles comparables aux précédents, même quand les enfants sont leurs victimes préférentielles .
L’acte névrotique justifié, parfois répétitif, et l’acte pervers revendiqué ou systématique, représentent la cohorte principale des cas judiciarisés . En général, il y a plusieurs victimes successives [réf. nécessaire], car l’absence de violences directes sur l’enfant fait longtemps ignorer la situation. De plus, il s’agit souvent de personnes qui organisent leur vie dans des « contextes facilitants » en fréquentant les structures de jeunes, qu’elles soient scolaires, sportives, etc. Les psychiatres s’accordent à reconnaître que de tels pédophiles usent rarement de violence mais plutôt de séduction , et qu’en tous cas ils ne tuent pas. C’est sans doute là qu’on peut parler de « pédomanie » (mot forgé par les mouvements de lutte contre la pédophilie), c’est-à-dire de consommation compulsive d’enfants, au sens psychiatrique d’une manie.
On a récemment évoqué comme étiologie de la pédophilie le fait que certains sujets ont pu être traumatisés dans leur enfance, en étant eux-mêmes l’objet de raptus pédophiliques. Si cela est souvent évoqué devant les tribunaux comme circonstance atténuante de la responsabilité, le peu d’études actuellement disponibles, souvent controversées, ne permet pas de trancher.
La psychiatrie descriptive, dont Richard von Krafft-Ebing est le précurseur, n’apporte aucune réponse à la question. Même si le catalogue encyclopédique des perversions sexuelles, illustrées par des cas cliniques, s’est modifié depuis, la psychiatrie clinique descriptive n’explique pas la pédophilie, et ne prétend à aucune thérapie. La Classification internationale des maladies de l’OMS définit la pédophilie (code F65.4) comme une « préférence sexuelle pour les enfants, généralement d’âge prépubère ou au début de la puberté ».
Restent la psychiatrie comportementale et la psychiatrie biologique. Elles proposent des solutions, mais beaucoup de psychiatres restent dubitatifs sur le fondement des méthodes et les résultats. La psychiatrie comportementale propose le reconditionnement, auquel on reproche son côté « Orange mécanique » violant la personne sans limite éthique claire, et la psychiatrie biologique propose la castration chimique, difficile à maîtriser même avec l’accord de l’intéressé [réf. nécessaire]. Rappelons que la castration chirurgicale, proposée également, est illégale en France.
Dans les deux cas, il y a une sérieuse difficulté pour garantir durablement la « guérison », et surtout prévenir les récidives. Malgré l’arsenal de mesures d’accompagnement thérapeutique que le droit a créé récemment, la pratique carcérale consiste souvent à attendre 55-60 ans avant d’envisager des libérations conditionnelles, en se disant que la chute de la libido est la plus sûre garantie .
Du reste, les experts-psychiatres spécialisés dans ces affaires, souvent contestés par leurs confrères, qui leur reprochent leurs prises de positions sans nuances et dictées par l’institution judiciaire, partagent entre eux cette conviction : « pédophile un jour, pédophile toujours » .
Le psychanalyste Serge André, dans une conférence princeps sur la pédophilie faite à Lausanne en 1999 (lire l’article) apporte un certain nombre d’éléments de réponse sur le sujet de la pédophilie, mais s’interroge longuement sur l’attitude de la société à ce propos, en particulier sur les manifestations monstres qui se sont produites sous le nom de « marches blanches ». On peut en rapprocher le fait, quand on tape « pédophilie » sur un moteur de recherche Internet, de récolter une écrasante majorité de réponses d’associations ou de particuliers qui tiennent des discours enflammés sur le sujet, pour une large minorité de réponse dans le champ de la psychiatrie ou de la psychanalyse.
Ainsi, pour Serge André, comme pour les autres psychanalystes qui participent au débat (et dont certains appartiennent à l’institution carcérale), plus que la pédophilie en elle-même c’est l’attitude ambiguë de la société qui pose problème[réf. nécessaire] – celle-ci se manifestant par différents phénomènes d’idolâtrie sociale envers les enfants : jeunisme, adulescence mais aussi publicités équivoques, etc. Il leur semble que l’importance qu’a prise cette question[Comment ?] dans la société en fait un des éléments-clefs d’une reconstruction du pacte social contemporain.
Beaucoup de psychanalystes expriment des réticences, voire un refus de traiter des pédophiles, ce en quoi Serge André constitue un cas à part.

Au-delà de ce recadrage — signifiant — du sujet, les psychanalystes s’accordent à considérer les pédophiles comme des pervers essentiellement (au sens psychanalytique), ni névrotiques, ni psychotiques, sans que cela soit pour autant pathologique. Il s’agit pour eux de structure de personnalité, et non de maladie. Ils n’excluent pas les actes pédophiles dans un cadre névrotique ou psychotique, mais la personnalité perverse leur semble par essence coïncider idéalement avec l’analyse qu’ils font des conduites pédophiles. Ils parlent de « perversion pédophile », sans rien y voir de péjoratif.
Si les psychanalystes trouvent compréhensible qu’on réprime l’abus sexuel et qu’on en enferme les auteurs, ils rechignent à apporter leur concours à l’institution judiciaire comme le font les psychiatres, car ils ne sont pas d’accord avec l’approche judiciaire, ni même psychiatrique, de la question.
Ils ne contestent pas, du moins pour les rares qui acceptent de prendre en charge de tels patients, comme Serge André et ses collègues, qu’ils puissent obtenir des résultats « thérapeutiques » intéressants. Mais ils se refusent à toute systématisation de « la pédophilie », qu’ils estiment illusoire, pour ne prendre en compte que l’auteur des faits (ou du désir), personne unique, dont l’histoire personnelle reste à dénouer, entre autres sur ce comportement qui fait problème à la société.

Il s’agit là de l’attitude du courant le plus récent de la psychanalyse, à savoir les lacaniens. Il est impossible de résumer ici l’ensemble des débats engendrés par cette conférence.
Il y est fait au passage référence à la violence symbolique des contes pour enfants, pain bénit de la psychanalyse. Sans évoquer ici la sexualité de Lewis Carroll (Alice au pays des merveilles), ou l’ouvrage de Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, on peut quand même citer quelques figures de l’inconscient collectif qui ont à voir avec le sujet : l’archétype de l’Ogre, dont Gilles de Rais, le sadique pédophile, tend la main au Roi des aulnes, version Michel Tournier, sans oublier Le Joueur de flûte de Hamelin des frères Grimm.
Les théories de Sigmund Freud et certaines conclusions controversées du rapport Kinsey indiquent que le désir de plaisir physique – assimilable à une forme de plaisir sexuel – existe chez l’enfant prépubère, l’ensemble de ces phénomènes étant désigné sous le nom de sexualité infantile. L’éveil à la sexualité peut survenir chez des mineurs de quinze ans (âge moyen de la majorité sexuelle). Aucun élément n’indique cependant qu’un enfant prépubère puisse de manière courante avoir la maturité nécessaire pour désirer consciemment avoir une relation sexuelle, et encore moins la désirer avec un adulte, ou résister au désir éventuel de celui-ci. Certaines personnes coupables d’abus sexuels sur enfants prétendent parfois avoir répondu à un désir de l’enfant, ou bénéficié du consentement de ce dernier
Les relations sexuelles entre un adulte et un enfant sont considérées comme représentant pour ce dernier un évènement traumatique, potentiellement porteur de lourdes séquelles psychologiques.
Deux principes liés au sujet font consensus dans les démocraties occidentales :

la réprobation de la contrainte sur autrui (ou « atteintes à la personne humaine ») : que ce soit sur le plan du travail (condamnation de l’esclavage ou de l’exploitation), du mariage (consentement mutuel obligatoire), de la sexualité (condamnation de la contrainte, du viol), ou de la vie (condamnation de l’homicide) ;
le respect de la volonté individuelle : il est matérialisé par le droit de vote, le droit à l’avortement, le droit à une libre sexualité, le droit au choix du partenaire ;
Un autre principe est lui assez largement partagé :

la protection de l’enfant comme volonté positive affirmée : au-delà de la déclaration des droits de l’enfant, on citera particulièrement l’obligation alimentaire et éducative, la condamnation de l’exploitation au travail, de la contrainte ou des atteintes physiques, morales ou sexuelles.

Dans l’étendue des choses qu’il traite en matière de droit des personnes, et pour éclairer le sujet, le droit peut s’analyser en deux notions complémentaires :

ce qui est de l’ordre du sujet : reconnaissance du droit au libre arbitre, responsabilité de ses actes. Ceci s’applique aux adultes (parents en particulier), qui sont par ailleurs rédacteurs des règles et des lois qu’ils s’appliquent, par délégation à travers l’élection des députés qui font la loi.
ce qui est de l’ordre de l’objet : déni ou forte restriction du droit au libre arbitre, responsabilité absente ou limitée, existence d’une protection. Ceci s’applique aux choses, aux évènements, aux animaux, et en matière de personnes aux enfants mineurs et aux incapables. Les objets du droit ne participent pas à sa rédaction, ils le subissent.
Cette analyse dichotomique appelle trois remarques :

Elle pose la question de la frontière entre sujet et objet. Elle se résout par la définition de la maturité juridique, appelée « majorité légale », variable selon les pays, mais aussi selon les époques. Cette majorité peut être pleine (actuellement 18 ans en France) ou partielle, comme la majorité sexuelle (15 ans en France actuellement[12]). À noter qu’il existe une « minorité renforcée » en dessous de 13 ans, qui aggrave les peines pour atteintes sur mineurs. Les incapables font l’objet de tutelle ou de curatelle car jugés incapables de libre arbitre.
En matière de relations sexuelles elle fait de l’adulte un sujet, donc initiateur et responsable, et par opposition de l’enfant (mineur) un objet, une victime potentielle, donc protégé. Selon le droit, le majeur seul a droit à une libre sexualité entre adultes(En France, égale pour tous depuis 1982 et l’abolition des lois anti-homosexuelles). Le droit ne reconnaît pas à l’enfant mineur la capacité de consentement à une relation sexuelle avec un adulte. Cette rigueur implique que dans une affaire de relations sexuelles adulte-enfant, l’enfant ne peut être entendu que comme une victime.
Le droit pénal condamne des actes, qu’ils soient délictueux ou criminels : il ne condamne donc pas la pédophilie en soi, qui est un concept extérieur au droit, mais les atteintes réelles sur mineur, qu’elles soient directes (relations sexuelles) ou indirectes (photos de mineurs montrant des atteintes ou encore images pornographiques exposées à des mineurs).
La médecine contribue au débat en répondant à la question de la maturité biologique par rapport à la sexualité. Elle apporte la notion de puberté, laquelle recouvre l’ensemble des modifications du corps humain qui le rendent apte à la reproduction. Ces modifications sont de l’ordre de l’anatomie (développement des organes et des caractères sexuels), et de la physiologie (existence d’hormones induisant l’appétence pour les activités sexuelles, apparition des règles). L’âge d’apparition et de fin de la puberté est en fait très variable selon les individus, mais il y a consensus pour dire qu’elle commence rarement avant 10 ans, et qu’elle est généralement achevée à 15 ans, avec un âge médian vers 12-13 ans.
Au-delà de la simple maturité du corps envisagée par la médecine, se pose la question de la maturité psychologique de l’individu. C’est une notion assez vague, où l’on peut distinguer deux aspects :

la maturité sociale, c’est-à-dire la capacité de faire des choix, d’affirmer et défendre ses choix et son intégrité, in fine en dehors du cercle familial et des proches connus. Elle peut exister tôt, mais elle est accomplie quand l’adolescent commence à sortir de la dépendance psychologique familiale, à se poser en égal dans les relations d’altérité, souvent même sans s’en rendre compte, avec la surprise de s’entendre répondre pour les premières fois par l’apostrophe « Monsieur, Mademoiselle ». Cet accomplissement se produit rarement avant 15 ans [réf. nécessaire], mais il y a des enfants à la personnalité très affirmée dès 10 ans, voire avant ;
la maturité sexuelle, ou en d’autres termes la capacité psychologique à désirer et affronter la ou les premières relations sexuelles.
Il n’y a aucun âge qu’on puisse valablement fixer sur cette question, certains restent vierges au-delà de 25 ans, d’autres franchissent le pas à peine pubères voire avant.

Les approches explicitées ci-dessus forment l’essentiel des principes qui justifient la manière dont nos sociétés perçoivent la pédophilie et sa pratique.

Certaines fournissent des critères très clairs d’appréciation, et prennent le dessus, d’autres sont plus difficilement utilisables.
Elles reconnaissent les principes du droit à la protection de l’enfant qui ne peut pas avoir de libre arbitre et de capacité de choix devant son manque de maturité sexuelle et qui doit donc être protégé de certaines perversions. Le développement de sa sexualité doit se faire dans un milieu équilibré et sécurisé.
En cas de relations sexuelles adulte-enfant, il est victime, a subi un dol, a droit à réparation. L’adulte doit être puni, et mis hors d’état de nuire.
Ce sentiment très largement partagé fait de la pédophilie une transgression majeure et intolérable de la norme de nos sociétés, donc une déviation et plus généralement une perversion sexuelle.
La relation sexuelle effective entre adulte et enfant, soit le passage à l’acte d’un pédophile, est très fortement condamnée dans la plupart des législations du monde, et reconnue comme un grave délit ou crime, une transgression majeure des droits fondamentaux de l’enfant sous le terme d’« abus sexuel sur mineur ». Il en va de même de la pornographie enfantine, aujourd’hui très largement condamnée y compris lorsqu’elle est d’imagination.

Si les abus sexuels sur mineurs sont longtemps restés méconnus ou sous-estimés dans les sociétés modernes, c’est à cause du silence qui les entourait. La nouveauté tient au fait que, de nos jours, on écoute les enfants parler des relations sexuelles qui peuvent leur être imposées par les adultes. Longtemps on crut que l’essentiel de ces récits relevaient du fantasme. Ainsi en était-il de Freud qui, dans le cas Bertha Pappenheim, crut discerner le fantasme quand elle lui parlait de son oncle attoucheur.

Dans la majorité des législations la simple attirance sexuelle ainsi que les fantasmes ne sont pas réprimés par la loi, car ils appartiennent au domaine de la pensée et du ressenti personnel.

En revanche, dans la plupart des législations du monde l’acte sexuel entre un adulte et un enfant est illégal et sévèrement réprimé vis à vis de l’adulte, considéré comme seul coupable et responsable. Contrairement aux lois sur l’agression sexuelle d’un adulte, l’absence de consentement de l’enfant n’est pas requis pour que l’infraction soit constituée : la relation sexuelle en elle-même est illégale. La séparation entre ces deux formes de traitement de l’infraction sexuelle dans la loi est généralement fondée sur une limite d’âge, appelée majorité sexuelle, qui diffèrent en fonction des pays et des orientations sexuelles (la relation homosexuelle est souvent autorisée plus tardivement que l’hétérosexuelle).

Il existe également des lois réprimant la simple incitation d’un enfant à un acte sexuel. Par ailleurs, la production, consommation, échange et simple détention de matériel pornographique impliquant des enfants sont souvent interdites. Dans certains pays, cette dernière loi s’applique également pour des œuvres d’imagination (dessins, images virtuelles, etc.) Par exemple, l’article 163.1 du code criminel canadien interdit « toute représentation photographique, filmée, vidéo ou autre, réalisée ou non par des moyens mécaniques ou électroniques »[13]. D’autres législations sont plus floues ou sujettes à interprétation sur ce point, comme l’article 227-23 du code Pénal français qui incrimine toute représentation d’un mineur lorsqu’elle possède un caractère pornographique: stricto sensus celà s’applique également à des images imaginaires, mais la jurisprudence reste floue. Voir l’article Lolicon pour plus de détails. En France, les textes pédopornographiques ne sont par contre pas interdits.
Eut égard à l’émotion importante que causent les affaire d’abus sexuels sur enfants dans la plupart des sociétés, certaines législations adoptent des lois d’exception parfois extrêmes pour réprimer avec plus de force les infractions sexuelles concernant des mineurs.
En droit français, le terme de pédophilie n’apparaît pas dans les codes et règlement du droit et de la justice : les termes utilisés pour décrire l’infraction de relations sexuelle entre un majeur et un mineur sont atteinte sexuelle pour une relation avec consentement de l’enfant, agression sexuelle ou viol lorsque le consentement n’est pas reconnu. Il existe également des infractions de corruption de mineur pour l’incitation de mineur à des actes sexuels. L’âge limite du mineur qui caractérise l’infraction sexuelle (âge de majorité sexuelle) est de 15 ans en général, 18 ans si le majeur est une personne ayant autorité sur le mineur (professeur, parent…).

La production, diffusion et détention d’images pornographiques impliquant des mineurs de 18 ans est illégale en France. L’article de loi tel qu’il a été écrit en mai 2002 ne parle pas seulement de photographie, mais de tout type d’image : dessin, peinture, images virtuelles, etc. De plus depuis la loi du 5 mars 2007, la simple consultation « habituelle » est aussi punie, même sans conservation.
La jurisprudence a depuis fixé quelques exceptions, afin de protéger certains objets d’art ou historiques : peintures explicites datant de la Grèce antique, œuvres d’art, etc. Toutefois la loi reste floue et sujette à interprétation sur ce point, ce qui pourrait attirer des problèmes à certaines professions comme l’édition ou la conservation de musées, et de faire évoluer la jurisprudence.

Enfin, plusieurs lois d’exceptions existent pour les crimes ou délits de nature sexuels concernant les enfants : possibilité de poursuivre en France un citoyen Français pour des crimes ou délits sexuels sur mineurs commis à l’étranger (par exemple dans le cadre du tourisme sexuel), levée du secret professionnel en cas de connaissance d’une infraction, inscription spécifique dans un fichier d’empreintes génétiques sur condamnation ou simple mise en examen, prescription courant à partir de la majorité de la victime, obligation de soins une fois la peine de prison purgée, détention dans un centre socio-médico-judiciaire une fois la peine purgée, pour une durée d’un an reconductible, si la probable dangerosité du criminel est décrétée

D’autres lois d’exception, souvent extrêmes, sont régulièrement proposées par des acteurs sociaux ou politiques au gré de l’émotion causée par l’actualité : annulation de toute prescription, inscription des crimes sexuels comme crimes contre l’humanité, rétablissement de la peine de mort, etc.

Tous les textes législatifs français peuvent être consultés sur ce site, plus particulièrement dans la section code pénal.

Viol : Articles 222-23 à 222-26 du code pénal ;
Agressions sexuelles : Articles 222-27 à 222-31 du code pénal ;
Atteintes sexuelles : Articles 227-25 à 227-27 du code pénal ;
Corruption de mineurs : Article 227-22 du code pénal ;
Exploitation à caractère pornographique de l’image d’un mineur : Article 227-23 du code pénal ;
Article 227-24 du code pénal ;
Article 321-1 du code pénal.
Le viol est un crime, jugé en Cour d’Assises alors que les autres infractions citées sont des délits, jugés en tribunal correctionnel.

Prescription : La prescription pour viols, agressions sexuelles, atteintes sexuelles sur un mineur de 15 ans par un ascendant ou par une personne ayant autorité est de 20 ans à partir de la majorité de la victime. Articles 7 et 8 du code de procédure pénale.

Par ailleurs, l’âge légal à partir duquel le mariage est autorisé est de 18 ans pour filles et garçons depuis 2005 (il était de 15 ans pour les filles auparavant). La loi française n’établit aucune relation particulière entre les dispositions concernant la majorité sexuelle et celles concernant le mariage.

La loi suisse
La législation a été nettement durcie par une loi d’avril 2002 intégrée dans l’article 197 du code pénal. Désormais le téléchargement sur un disque dur et la copie de clichés illicites, sur divers supports peuvent être assimilés à des cas de fabrication déjà réprimés sous l’ancien droit et s’ils sont obtenus depuis un site étranger, ils constituent également un acte d’importation pouvant être sanctionné. En revanche, une simple consultation non conservée ne serait pas directement sanctionnée.
Arrêt 6P.117/2004 et 6S.311/2004 du 11 octobre 2004
Décision-cadre 2004/68/JAI du Conseil du 22 décembre 2003 relative à la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie : lire en pdf.

Terminologie controversée s’agissant de la pédophilie: crimes contre l’honneur et problèmes éthiques et sociaux
Des intellectuels ont critiqué la manipulation des mots. Jacques Bouveresse a dit que les phénomènes d’ ”emballement” médiatique – comme l’affaire d’Outreau – “peuvent avoir un effet absolument destructeur sur la vie des gens”. Pierre Bourdieu a dit que “l’âge est une donnée biologique socialement manipulée et manipulable” et a appelé l’adolescence d’une condition temporaire, “mi-enfant, mi-adulte”, “ni enfant, ni adulte.
Plusieurs chercheurs ont denoncé l’usage erroné du mot “pédophilie”. Agustín Malón et M. Seligman ont défendu que les excès démagogiques et rhétoriques doivent être évités par certains groupes sociaux, politiques, professionnels et académiques. Malón, de même que Durrant et White[21], Goodyear-Smith et Renshaw, ont conclu que cet usage erroné “est contre-productif pour le bien-être des enfants et de leur familles

Depuis la célèbre affaire Dutroux, les médias traitent de plus en plus souvent d’affaires dites de pédophilie.

Aujourd’hui les médias sont souvent accusés de traiter ce thème de façon trop émotionnelle, imprécise et sans réel travail journalistique, surtout lors de certaines affaire très médiatiques – par exemple l’affaire ado 71 et l’affaire d’Outreau, où ils ont été accusés d’enfreindre régulièrement la présomption d’innocence et d’instaurer un climat hystérique peu propice à une justice sereine et équitable. Lors de ces affaires plusieurs prévenus se sont suicidés avant même leur jugement (dont certains qui se sont révélés innocents par la suite). Les médias ont été accusés par un certain nombre de personnes (dont la Ligue des droits de l’homme) d’avoir provoqué ces actes extrêmes par leur manque de précautions et leurs accusations sans fondement.

Parmi les injustices que cet emballement médiatique et politique a provoqué, on note l’affaire Alain Hodique, époux de la directrice de l’école de Bucquoy est accusé en 2001 d’attouchement sur des élèves de son épouse et incarcéré un an. En 2007, la cour de cassation l’innocente. Cette affaire a eu d’autant plus de répercussions que le ministre de l’Education d’alors, Jack Lang, avait repris à son compte les accusations d’une partie des villageois contre Alain Hodique.

Quelquefois, certains journalistes ont utilisé une terminologie erronée par rapport à la pédophilie. Pour Felipe Pena, auteur et professeur de journalisme, « il n’y a plus de place pour des définitions messianiques utilisées de manière manichéenne pour satisfaire des simplifications conceptuelles » et il n’y a pas comment l’éthique journalistique violer le Code pénal.

Tous les Codes de déontologie de la profession définent la vérité, la véracité et/ou la précision des informations comme des valeurs fondamentales du journalisme, et interdisent la pratique des crimes contre l’honneur (notamment la calomnie et la diffamation) et/ou l’incitation à la haine ou à la violence, y compris les Codes de la FIJ (Fédération internationale des journalistes), du Syndicat national des journalistes de France[29], la Charte de Munich[30] et la Résolution 1003 (2003) du Conseil de l’Europe relative à l’éthique du journalisme.

En raison du classement de la pédophilie comme une maladie mentale et à cause d’une charge très fortement péjorative liée à ce mot, se référer à un non-pédophile comme « pédophile » peut caractériser la pratique de plusieurs crimes contre l’honneur, surtout dans le cas d’une relation amoureuse ou sexuel avec consentement (soit non définit légalement comme abus sexuel), telles que celles entre adultes et adolescents au-dessus de l’âge du consentemen.

La pédophilie comme système de chantage
La stigmatisation sociale de la pédophilie, et la gravité des peines encourues en justice, en font parfois un moteur de chantage ou d’instrumentalisation.

Depuis longtemps, les ballets roses[ ou bleus, expression désignant des orgies au cours desquelles des adultes se livrent à des jeux sexuels avec des mineurs, filles (ballets roses) ou garçons (ballets bleus), ont formé la trame d'affaire réelles, comme l'affaire des ballets roses en France en 1959, ou fantasmées, telle que l'affaire des ballets roses en Belgique dans les années 1970.

On a constaté des cas d'instrumentalisation judiciaire de la pédophilie par des parents en instance de divorce.[réf. nécessaire] De la même, il est arrivé que des enfants « règlent leur comptes » à un enseignant (comme décrit dans le livre Les Risques du métier). Il arrive aussi que de jeunes délinquants, arrêtés pour de petits délits, accusent des adultes de pédophilie ou de recours à la prostitution de mineurs, pour se transformer en victimes.

En France, l’affaire d’Outreau a défrayé la chronique pour des charges abandonnées au bout de plusieurs années de prison préventive . Sans oublier néanmoins que des enfants furent bien victimes et que leurs tortionnaires furent condamnés.

L’instrumentalisation peut aussi être politique : Daniel Cohn-Bendit, en évoquant son passé soixante-huitard dans un livre, a été accusé de pédophilie des années plus tard.

La pédophilie dans l’art
Littérature

Illustration de La Grande Danse macabre des vifs, par Martin Van MaeleCertains artistes évoquent la pédophilie dans leurs œuvres, ce qui provoque souvent des scandales. Des écrivains comme Gabriel Matzneff (Les Moins de seize ans) ou Tony Duvert (Prix Médicis en 1973 pour Paysage de fantaisie) ont régulièrement été accusés de faire l’apologie de la pédophilie dans leurs œuvres. Le Bon Sexe illustré, écrit par ce dernier, se veut une critique féroce du carcan normatif de l’éducation sexuelle contemporaine. Plus récemment, en septembre 2002, la sortie du roman Rose Bonbon de Nicolas Jones-Gorlin a provoqué une polémique suite à la plainte déposée par une association de protection de l’enfance. En 2006, Yann Queffélec publie Mineure (ISBN 2846281378), un roman dans lequel Sibylle, une jeune fille de treize ans, tente de séduire Michel, un homme de cinquante-cinq ans, marié et père de jumelles du même âge. Il ne veut pas céder, mais finira progressivement par succomber à son charme.

D’autres auteurs, malgré les scandales qu’ils ont provoqués à leur époque, n’ont pas été inquiétés, notamment grâce à leur célébrité : par exemple Vladimir Nabokov (Lolita), Roger Peyrefitte (Les Amitiés particulières), André Gide (L’Immoraliste) ou encore Henry de Montherlant (La Ville dont le prince est un enfant).

Image
Sur le plan de l’image, certains artistes dépeignent la figure de l’enfant sous un jour teinté d’érotisme ou de sensualité : on peut citer en matière de photographie les travaux de Bernard Faucon, Sally Mann ou Mike Tedder. Beaucoup d’artistes ont élu l’enfant pour sujet principal ou occasionnel de leurs œuvres, sans pour autant qu’il faille nécessairement parler d’art à caractère pédophile dès que de la sensualité se dégage. L’intention de l’artiste et les circonstances de la création d’une œuvre sont des données difficiles à établir. David Hamilton avec ses photos » artistiques » de jeunes filles puberes dans les annees 70.

Cinéma
En 2001, James Bolton écrit et réalise le film Eban & Charley dans lequel il montre l’amour réciproque d’Eban — un jeune homme de 29 ans — pour Charley — un adolescent de 15 ans. En 2001, Emmanuelle Bercot écrit et réalise le film Clément dans lequel elle s’attribue le rôle principal, celui de Marion, une trentenaire qui s’éprend d’amour pour un ami de son filleul de treize ans, Clément. En 1967, Stanley Kubrick réalise Lolita, l’adaptation du livre du même nom. Dans ce film (très censuré à cause de l’opinion publique très puritaine à cette époque), Kubrick montre l’amour obsessionnel de cet homme pour Lolita, une nymphette très attirante.

Depuis quelque années l’abus sexuel sur mineur, qui peut être une conséquence de la pédophilie, bénéficie d’une attention sociale intensive. De nombreuses associations se sont créées dans le but proclamé de protéger les enfants et de lutter contre l’abus sexuel. L’expression lutte contre la pédophilie est souvent évoquée, bien que la pédophilie soit une attirance sexuelle : l’action sociale peut lutter contre des actes d’abus sexuel, mais seule une approche médicale ou psychologique peut éventuellement travailler à la disparition ou l’évolution d’attirances pédophiles chez un être humain.

Dans les années 1970, certains mouvements de militantisme pro-pédophile ont vu le jour en Europe du Nord et aux États-Unis. D’abord très actifs, ils ont subi un certain nombre de revers dans diverses affaires judiciaires et médiatiques, au point de quasiment disparaître dans les années 1990. À partir de la fin du XXe siècle, l’avènement d’Internet leur a donné une nouvelle force. Aux Pays-Bas existe un parti favorable à la pédophilie, le PNVD, fondé par Ad Van den Berg, et comptant à ce jour trois membres connus : il demande l’abaissement de la majorité sexuelle à 12 ans, et, à terme, son abolition « à terme, cette limite d’âge devra disparaître totalement », ainsi que la légalisation de la pornographie enfantine dans un contexte bien précis et encadré.

Le complexe d’Electre

Dimanche 2 mai 2010

Complexe d’Électre

Le complexe d’Électre est un concept théorique rattaché à la première topique de Freud, destiné à expliquer le développement psychique de la petite fille. Il fait pendant au concept de complexe d’Œdipe chez le jeune garçon. Carl Gustav Jung l’a nommé « complexe d’Électre » en référence à l’héroïne grecque qui vengea son père Agamemnon en assassinant sa propre mère, Clytemnestre. Freud désignait ce concept par « complexe d’Œdipe féminin » dans ses propres écrits.

Selon Freud, le développement psychique de l’enfant se déroule selon trois stades successifs . Au cours du premier stade, dit « oral », l’enfant prend son plaisir par l’acte de manger. Le sein de la mère est alors perçu par l’enfant comme objet de plaisir. Lors du second stade, dit « sadique-anal », l’enfant prend conscience de sa puissance sur le monde. Enfin, lors du troisième stade, dit « œdipien » ou « phallique », se développe, chez le garçon, le complexe d’Œdipe : les pulsions d’attirance à l’égard de la mère se renforcent, l’enfant devient de plus en plus exigeant et envahissant, ce qui provoque l’opposition du père, lequel cristallise ensuite sur lui des pulsions hostiles de la part du garçon. À l’adolescence, ce complexe provoque l’attirance du garçon pour les filles, et son rejet des autres garçons, ce qui conditionne une sexualité de type hétérosexuelle.

La difficulté saute cependant aux yeux : s’il en allait exactement de la même manière chez la petite fille, alors l’adolescente devrait ressentir une attirance sexuelle pour les autres filles et un rejet des garçons ; or, ce n’est pas ce qu’on observe ; aussi Freud fut-il amené à aménager le concept de complexe d’Œdipe pour l’adapter au cas de la fille et résoudre l’asymétrie constatée entre le développement psychique des garçons et celui des filles.

Pour Freud, il est clair que la mère « nourricière » est le premier objet d’amour chez la fille comme chez le garçon ; il est ‘clair également que la fille, comme le garçon, découvre vers trois ans que les parents entretiennent des relations sexuelles dont l’enfant se sent exclu ; il est enfin tout aussi clair que la fille, comme le garçon, cherche alors à s’interposer entre ses parents.

Toutefois, à ce moment, le processus chez la fille se dissocie nécessairement du processus chez le garçon. En effet, lors de cette première phase, dite « phallique » du complexe d’Œdipe, le garçon peut s’interposer entre ses parents en entrant ouvertement en conflit avec son père, ce qu’il réalise en exhibant son pénis ; le père, qui sanctionne ce comportement, se présente alors comme une figure de l’autorité liée à la peur de la castration.

De son côté, la fille, privée de pénis, ne peut entrer ouvertement en conflit avec le père. Aussi chez elle la castration n’est-elle pas ressentie comme la peur de perdre son pénis, mais comme la frustration de ne pas en avoir. Elle peut alors, selon Freud, réagir de trois façons :

rejet pur et simple de la sexualité ;
rejet de la castration et donc de son destin de future femme ;
choix du père comme objet.
Plus précisément, dans ce dernier cas, la fille commencerait à ressentir une attirance pour son père — attirance toute calculée, s’entend, puisqu’il s’agit de lui soutirer un pénis pour se procurer celui qui lui manque. Cette attirance pour le père peut donc s’élaborer sans entamer la pulsion sexuelle pour la mère « nourricière », même si celle-ci prend, temporairement du moins, figure de rivale dans la quête du pénis paternel.

L’explication proposée par Freud permet ainsi de comprendre comment la fille, malgré le même « point de départ » que le garçon (les pulsions sexuelles envers la mère), en vient à ressentir des pulsions sexuelles pour son père et des pulsions hostiles pour sa mère (situation contraire à celle du garçon).

S’il y a même point de départ dans le désir de la mère, la castration divise garçon et fille quant au début du complexe. La castration est, pour le garçon, la sortie du complexe d’Œdipe : le père pose pour le petit d’homme cette menace par excellence, et cet enfant doit abandonner la convoitise de la mère. La castration met fin au complexe d’Œdipe. Tandis que le complexe d’Électre, à proprement parler, débute par la castration – c’est la castration qui, comme on l’a vu, introduit le désir du père. Cette fonction opposée de la castration quant au complexe chez le garçon et la fille n’est pas sans conséquences sur le développement psychique ultérieur.

Comme le complexe d’Œdipe pour le garçon, le complexe d’Électre trouve à se résoudre au moment de l’adolescence, lorsque la fille surmonte la castration, qu’elle commence à élaborer une personnalité propre empruntant à la fois à son père et à sa mère, et qu’elle se met à rechercher d’autres partenaires sexuels que ses parents. Le désir d’enfant, à l’âge adulte, ne serait alors chez la femme qu’une simple sublimation du désir de pénis ressenti dans l’enfance.

Cependant, si le complexe d’Œdipe permet l’expression radicale de l’attirance à l’égard de la mère et d’hostilité à l’égard du père, au contraire, dans le complexe d’Électre, cette expression se teinte toujours d’ambivalence. La fille est attirée par son père, mais seulement dans la mesure où elle cherche à lui soutirer un pénis ; elle ressent une rivalité à l’égard de sa mère, mais continue par ailleurs à s’identifier à elle. Aussi Freud pensait-il que le complexe d’Électre ne se résolvait jamais complètement chez la fille et que ses effets s’en ressentaient dans sa vie mentale de femme.

Nous renvoyons d’abord aux critiques adressées contre le complexe d’Œdipe, et qui s’avèrent également valables pour le complexe d’Électre.

En outre, le complexe d’Électre autorise trois critiques autonomes. D’abord, Freud prête aux petites filles de son époque une connaissance de l’anatomie humaine qu’elles n’avaient probablement pas. Nombre de jeunes femmes de son époque arrivaient au mariage dans la plus grande ignorance des choses du sexe. Beaucoup ignoraient ce qu’était un pénis, n’ayant jamais vu d’homme nu, surtout pas leur père ou leur frère. On ne comprend donc guère comment une « envie de pénis » peut se développer chez quelqu’un qui ignore jusqu’à l’existence même du pénis. De nos jours, cette explication de Freud reste donc teintée de mystère.

(Note concernant l’origine de l’envie de pénis : Il se pourrait que simplement, ce désir soit programmé génétiquement. Il suffit de songer aux pulsions, par exemple, chez le chien, lesquelles, sans aucune expérience sexuelle, mènent l’animal à procréer. Il y a donc, dans l’espèce même, une prédisposition génétique à créer cette forme de désir, il en est peut être de même chez l’être humain.)

Ensuite, la notion de complexe d’Électre a entraîné de vives critiques de la part du mouvement féministe. L’explication de Freud s’élabore, en effet, à partir d’un « calque » établi à partir du développement psychique du garçon, exactement comme si la fille était une sorte de garçon « bizarre », « anormal ». Freud, d’ailleurs, ne dissimule nullement son point de vue puisque, à l’en croire, la fille se considérerait elle-même comme un « garçon privé de pénis ». À aucun moment Freud ne s’aperçoit que la féminité pourrait s’analyser comme une réalité positive, plutôt que comme une négativité, un défaut par rapport à un garçon supposé meilleur (puisque lui ne « manque » de rien). La conclusion freudienne selon laquelle le complexe d’Électre ne se résoudrait jamais complètement chez la femme adulte implique que la femme serait beaucoup moins stable psychologiquement que l’homme, hystérique ou caractérielle.

Enfin, le mouvement gay et lesbien conteste fortement les positions de Freud. À l’en croire, en effet, la pérennité du complexe d’Électre chez la femme laisserait entendre que l’homosexualité féminine serait « normale », tandis que l’homosexualité masculine constituerait un symptôme de trouble psychique dû à un complexe d’Œdipe « inversé » non résolu.

On peut proposer aussi une version plus ouverte de l’hypothèse freudienne : plutôt que de partir du savoir supposé des petits concernant l’anatomie sexuelle , on pose la situation infantile initiale comme marquée par un désir amoureux incestueux d’avec la mère, désir exclusif et jaloux par nature. Or tout indique que toute société exige de ses adultes l’intégration de l’interdit de l’inceste, sous peine de sanctions graves. Ce serait alors ce passage du vécu incestueux fondateur au vécu de la loi d’interdit de l’inceste qui déterminerait les crises œdipiennes et leurs conséquences propres à chaque histoire de chacun, y compris dans les choix d’orientation sexuelle adulte. Le mode d’expression de Freud équivaudrait à celui d’un précurseur daté. Mais il reste que la notion de phallus, et que dans la pensée inconsciente il serait le seul organe sexuel représenté car pouvant être castré, conserve toute sa valeur : ce qui nous ouvre à la notion moderne du lien avec l’Autre, le moyen du lien étant le phallus (nommé ainsi sur la base de ce qu’est déjà le sexuel pour la mère), ce qui dans le monde du langage qui est celui de l’être humain se nomme « la copule ». L’enfant fille ou garçon ne cesserait pas alors de chercher ce qui ferait copule avec sa mère : la langue, le caca, etc. Mais aussi toute une série de comportements signifiants pour les parents. Le phallus est alors le symbole universel privilégié car central dans le lien sexuel de l’un à l’autre et dans la production des enfants. Représenté par de multiples avatars, il est utilisé aussi bien par les hommes que par les femmes, et est donc en fait indépendant du choix d’orientation sexuelle de la personne, et ne présuppose aucune supériorité autre que celle des préjugés infantiles. Et la pensée inconsciente du désir se mobiliserait sans cesse autour de l’affirmation ou de la « castration » de ce qui fait « liant » avec l’Autre (en général d’abord la mère biologique) et qui est révélé par un tiers (en général le père biologique). C’est l’orientation lacanienne qui permet aujourd’hui cette lecture modernisée de Freud.

L’existence de transsexuels masculins vers féminins, plus nombreux que dans l’autre sens, contredit également la conception selon laquelle toute femme désire un pénis.

Le complexe d’Oedipe

Dimanche 2 mai 2010

Complexe d’Œdipe

Antoine-Denis Chaudet, Œdipe enfant rappelé à la vie par le berger Phorbas qui l’a détaché de l’arbre, 1801.Le complexe d’Œdipe (Ödipuskomplex en allemand), parfois contracté dans l’expression « l’Œdipe », est un concept central de la psychanalyse. Théorisé par Sigmund Freud dans sa première topique, il est défini comme le désir inconscient d’entretenir un rapport sexuel avec le parent du sexe opposé (inceste) et celui d’éliminer le parent rival du même sexe (parricide). Ainsi, le fait qu’un garçon tombe amoureux de sa mère et désire tuer son père répond à l’impératif du complexe d’Œdipe.

Le drame grec éponyme est selon Freud le plus à même de mettre en images le désir universel et inconscient que tout enfant ressent. Pour Georges Politzer « le complexe d’Œdipe n’est ni un « processus » et encore moins un « état », mais un schéma dramatique »alors que pour Roger Perron il désigne « le réseau des désirs et des mouvements hostiles dont les objets sont le père et la mère, et des défenses qui s’y opposent ; il est également la structure centrale du psychisme humain.

La psychanalyse identifie ainsi trois étapes fondamentales de développement psycho-affectif : le stade oral, le stade anal et le stade phallique lors duquel survient chez le garçon, comme chez la fille mais d’une toute autre manière, le complexe d’Œdipe. C’est en effet de 3 à 6 ans environ que le désir libidinal portant sur le parent de sexe opposé apparaît, et que le parent de même sexe est perçu comme un rival. Le complexe connaît ensuite un déclin avec la pré-adolescence : l’enfant affronte le complexe et son désir libidinal se dirige alors vers d’autres objets.

Freud fait du complexe d’Œdipe le pivot de sa théorie pulsionnelle et méta-psychologique, devenant ainsi le concept-clé de la psychanalyse et de ses courants dérivés. L’histoire du complexe d’Œdipe est en effet associée à la théorie freudienne ainsi qu’à l’histoire de la psychanalyse dans son ensemble. Le concept a également motivé nombre de critiques de différentes natures, internes à la psychanalyse comme issues d’autres disciplines.

Sigmund Freud dit avoir découvert le complexe au cours de son auto-analyse en la rapprochant de l’histoire du héros grec Œdipe, personnage de la mythologie, telle qu’elle est narrée par le dramaturge Sophocle dans la pièce Œdipe roi principalement. La lettre à Wilhelm Fliess du 15 octobre 1897 est en effet le seul document qui permette de dater la conceptualisation du complexe. Le neurologue viennois explique ainsi : « J’ai trouvé en moi comme partout ailleurs des sentiments d’amour envers ma mère et de jalousie envers mon père, sentiments qui sont, je pense, communs à tous les jeunes enfants ».

Gustave Moreau, Œdipe et le sphinx, 1864Dans ses premiers écrits, Freud parle aussi de « complexe nucléaire » ou de « complexe maternel », notamment dans son Étude sur l’hystérie (1895)[. Il rappelle qu'il a été conduit à élaborer ce complexe en étudiant la sexualité, les perversions et les névroses de l'adulte qui remontent à l'enfance. L'origine de l'Œdipe est en effet étroitement liée à l'« évolution sexuelle de l'enfant », ce qui fonde également tout l'édifice théorique de la psychanalyse. Freud constate dans un premier temps, « par l'observation directe et par l'étude analytique de l'adulte », que « l'enfant se tourne d'abord vers ceux qui s'occupent de lui ; mais ceux-ci disparaissent bientôt derrière les parents ». Ces rapports, note Freud, « ne sont nullement dépourvus d'éléments sexuels ». L'enfant prend donc ses parents comme des « objets de désir ».

En 1900, dans son essai fondateur de la science des rêves, L'Interprétation des rêves, Freud rend publique sa théorie du complexe d'Œdipe[. Il y explique que le rêve fait souvent référence à ce qui est l'un des désirs d'enfance. « Dans le contenu latent du rêve, Freud trouve, à titre d'élément constant, le résidu diurne, il trouve également qu'il existe une relation entre ce résidu et les souvenirs d'enfance ». Selon son expression, rappelle Henri F. Ellenberger, Freud pense que « le rêve a un pied dans le présent et un pied dans l'enfance »[F 2]. Freud explique aussi que le cas des névrosés permet d’observer des désirs affectueux ou hostiles pour les parents. Dès ce texte, le fondateur de la psychanalyse se réfère explicitement à la tragédie grecque. En 1911, il ajoute que le complexe de castration est profondément lié à l’Œdipe et que dans le drame de Sophocle l’aveuglement d’Œdipe opère comme substitut de la castration.

Le mythe œdipien semble dès lors pour Freud la mise en récit d’un complexe psychique universel. Dans la mythologie grecque, Œdipe est le fils de Laïos et de Jocaste, souverains de la ville de Thèbes. Un oracle prédit à Laïos qu’il sera plus tard tué par son propre fils. Effrayé, Laïos décide d’abandonner Œdipe dans la montagne. Un berger trouve l’enfant et le confie au roi de Corinthe, Polybos, qui l’élève comme son propre fils, sans toutefois lui révéler le secret de ses origines. C’est lui qui le nomme Œdipe. Un nouvel oracle prédit ensuite à Œdipe qu’il sera le meurtrier de son père. Ignorant que Polybos n’est pas son père biologique, il quitte Corinthe pour que la prédiction ne puisse se réaliser. Pendant son voyage, il rencontre Laïos et ses serviteurs et tue alors son vrai père, qu’il prend pour le chef d’une bande de voleurs de grands chemins. Lorsqu’il arrive à Thèbes, but de son voyage, il ne peut entrer dans la ville car un monstre, le Sphinx, en empêche l’accès, tuant et dévorant tous les voyageurs incapables de résoudre l’énigme qu’il leur propose. Œdipe, rusé, parvient à trouver la solution et défait le monstre. Œdipe devient dès lors un héros adulé par les habitants de la ville, qui finissent par le proclamer roi et lui donnent comme femme la veuve de Laïos, Jocaste, sa propre mère. Freud voit donc dans ce mythe l’illustration idéale des désirs extrêmes infantiles : « nous donnons le nom de « complexe d’Œdipe » parce que la légende qui a pour héros Œdipe réalise, en ne leur imprimant qu’une très légère atténuation, les deux désirs extrêmes découlant de la situation du fils : le désir de tuer le père et celui d’épouser la mère . Il remarque en effet que ce complexe se retrouve également dans d’autres drames culturels, comme dans Hamlet de Shakespeare. En 1967, Jean Starobinsky, dans la préface d’Hamlet et Œdipe d’Ernest Jones, argue que si Œdipe est le drame du dévoilement, la tragédie d’Hamlet est le drame du « refoulement « .

En 1905 Freud publie Trois Essais sur la théorie de la sexualité, ouvrage fondateur de la psychanalyse. Même si le complexe n’y apparaît pas explicitement, Freud définit tout d’abord la libido comme l’énergie sexuelle aux fondements de la dynamique psychique qui tend à se projeter sur un objet extérieur. En second lieu, il insiste sur les vicissitudes du choix de l’objet d’amour dont la source est le complexe d’Œdipe. Il pose donc que la réalité de la sexualité infantile est induite par la mère, et que la tétée est le premier rapport sexuel. De cette sexualité archaïque dépend le complexe d’Œdipe, déterminant à son tour le tabou de l’inceste. Freud continue de développer sa théorie en expliquant que la libido donne naissance à des perversions sexuelles diverses lorsque le schéma originel œdipien subit des altérations. Enfin, elle s’incarne dans un symbolisme sexuel dense, notamment dans les rêves. Le thème est par ailleurs central dans l’analyse de Dora, en 1905.

En 1909, un autre cas pratique, célèbre dans la littérature psychanalytique, permet à Freud de valider sa conception du complexe. Le cas dit du « petit Hans » — de son vrai nom Herbert Graf — suit en effet fidèlement le schéma dramatique œdipien. La phobie du cheval apparaît chez Herbert Graf quand il assiste à la chute d’un cheval et qu’il le voit à terre se débattre. Freud va postuler que son inconscient associe son père au cheval, qu’il aime son père mais qu’il souhaiterait également sa mort pour pouvoir coucher avec sa mère. Cela va développer chez lui une névrose phobique, l’impossibilité de sortir dans la rue par crainte d’être mordu par un cheval. Freud le prend en cure analytique et, au fur et à mesure de sa psychothérapie, l’aide à surmonter son complexe d’Œdipe.

La résolution du complexe d’Œdipe lors du travail du rêve. Ce n’est cependant qu’en 1910, dans un texte intitulé Contribution à la psychologie de la vie amoureuse qu’apparaît le terme « complexe d’Œdipe ». La notion est l’invention de deux autres psychanalystes officiant à Zurich, Carl Gustav Jung et Franz Riklin. Le complexe (gefühlsbetonte Komplexe en allemand) » est utilisé dès lors en psychanalyse pour désigner des fragments psychiques inconscients à forte charge affective. Freud l’utilise ainsi pour décrire ce qui est pour lui le principal complexe psychique humain, celui qui est constitué dans les premiers temps de vie, en fonction de ses parents : le « complexe nucléaire ». Sa pensée est ensuite développée la même année dans l’essai « Un type particulier de choix d’objet chez l’homme » où il explique que les objets d’amour sont autant de substituts de la mère. Le cas de la fille est déjà particulier : Freud pose qu’à la place de la peur de perdre son père, comme le petit garçon pour sa mère, elle développe une « envie du pénis ».
Dès 1912 et 1913, « l’Œdipe » est entré totalement dans la pensée clinique de Freud et celui-ci s’attache à en étudier son universalité, dans l’ouvrage Totem et Tabou. Freud y avance la thèse suivante : celle de la « vocation civilisatrice du complexe », résumée par Roger Perron : « en des temps très anciens les humains étaient organisés en une horde primitive dominée par un grand mâle despotique qui monopolisait les femmes et en écartait les fils, fût-ce au prix de la castration ». Le complexe serait donc transmis de génération en génération et avec lui le sentiment de culpabilité associé. Freud recherchera en effet toujours à relier ces concepts, et en particulier celui du complexe d’Œdipe, à une théorie générale de la phylogenèse (de l’histoire de l’humanité comme espèce).

Nombre de psychanalystes commencent à mener des études, dans la continuité de celles de Freud, dont Otto Rank. Freud note en effet : « Otto Rank a montré, dans une étude consciencieuse, que le complexe d’Œdipe a fourni à la littérature dramatique de beaux sujets qu’elle a traités, en leur imprimant toutes sortes de modifications, d’atténuations, de travestissements, c’est-à-dire de déformations analogues à celles que produit la censure des rêves ». Par la suite deux ouvrages de Freud vont développer sa pensée, et ce définitivement. En 1923, dans un court essai intitulé « L’Organisation génitale infantile », Freud décrit les phases psychoaffectives de la psychogenèse, qui est également l’un des concepts centraux de la théorie psychanalytique, et dont « la phase phallique constitue l’acmé du drame œdipien ». L’intérêt croissant porté au complexe d’Œdipe motive Freud à faire le point sur sa découverte. Il fixe sa théorie dans les Conférences d’introduction à la psychanalyse, en 1917 et 1918. Il s’arrête particulièrement sur les observations directes et sur les analyses d’adultes névrosés, expliquant que « chaque névrosé a été lui-même une sorte d’Œdipe » .

Le cas clinique dit de « l’homme aux loups » (1918) offre une illustration majeure du complexe masculin. Freud classe alors le complexe au sein des « schémas phylogénétiques » qui ont pour rôle de structurer la psyché inconsciente et ce depuis l’aube de l’humanité. Par ailleurs, l’introduction de la nouvelle dualité pulsionnelle et d’une seconde topique va permettre une nouvelle approche de l’Œdipe. Freud explique en effet que le transfert présente les restes de la résolution, plus ou moins accomplie, du complexe. Celle-ci laisse en effet des « cicatrices narcissiques ». Face à cette souffrance, la psyché pousse le Moi à résoudre en totalité le complexe. Ce faisant, le Moi est envahi de compulsions. Selon lui l’intensité de ces compulsions, qui culmine dans les névroses obsessionnelles, est à l’origine de la notion de « destin » dans les drames, dont la tragédie de Sophocle. Dans Psychologie des foules et analyse du moi (1921), Freud aborde « l’avant Œdipe », caractérisé par une neutralisation des affects et permis par l’ambivalence. L’enfant fixe ainsi ses affects négatifs et positifs sur des objets extérieurs au lieu d’investir ses parents.

Enfin, en 1923, dans Le Moi et le Ça, Freud métapsychologis la notion de complexe d’Œdipe, en en faisant un prérequis structurant de l’instance morale, le Ça. En effet, lors de la maturité du complexe, plusieurs scénarios sont possibles : affects féminins pour le père chez le garçon ou désir féminin pour la mère chez la fille, et vice-versa. Toutes les variations sont dues selon Freud à la « bisexualité constitutionnelle de l’individu ». L’enfant est en effet inconsciemment bisexuel, son orientation sexuelle se précisant par la suite. Ces variations complexes entraînent donc une attitude positive du garçon pour son père (le complexe inversé), ou une attitude négative (le complexe normal), le tout formant, virtuellement le « complexe d’Œdipe complet ». Ces identifications variées expliquent la diversité des étiologies et des personnalités. Elles constituent fondamentalement un « idéal du moi » qui détermine la morphologie du Surmoi]
L’essai de 1923, « Le problème économique du masochisme », pose que le Surmoi, instance psychique proclamant les interdits, est né de l’introjection des premiers objets libidinaux du Ça dans le Moi. La relation en est de fait désexualisée mais le Surmoi conserve les caractères parentaux. Freud propose là une thèse selon laquelle la source de la morale est le Surmoi et, donc, l’Œdipe[A 8]. La même année, dans l’essai « L’Organisation génitale infantile » Freud tente d’expliciter les zones d’ombre de l’Œdipe féminin. Il stipule que seul le pénis a une réalité psychique, y compris chez la fille. Celle-ci envierait donc l’acquisition du phallus, même si Freud admet être impuissant à poursuivre l’analyse de la sexualité féminine.

En 1924, un autre essai fait une place majeure au complexe : « La disparition du complexe d’Œdipe ». Freud y décrit la façon dont le complexe disparaît avec le temps, comme la chute des dents de lait précise-t-il, et ce « même si ce qu’il décrit est davantage la dissolution du conflit œdipien » plutôt que la disparition pure et simple de ce qu’il a défini avant comme « l’ossature même du psychisme humain ». En 1925, dans « Quelques conséquences psychologiques de la différence anatomique entre les sexes », Freud aborde la « préhistoire du complexe d’« Œdipe » ». Les prémisses du complexe se jouent en effet dans les premiers temps de la découverte des zones érogènes.

Avec l’ouvrage Malaise dans la civilisation (1929), Freud délivre l’interprétation psychanalytique des structures inconscientes sous-tendant l’humanité et ses fantasmes. Il décrypte les symboles sexuels universels trouvés dans les rêves. Selon Ellenberger, « Freud allait bientôt déduire du caractère universel du complexe d’Œdipe l’idée du meurtre du Père primitif par ses fils ». Dès lors Freud complète son modèle théorique en précisant la figure du père primitif. Le garçon nourrit envers lui des désirs de mort car il a peur d’être châtié et castré par celui-ci. La castration prend ainsi place dans la théorie générale du complexe, comme peur infantile de se voir déposséder de la puissance sexuelle par la figure paternelle. Ce complexe de castration survient donc au sortir de l’Œdipe, comme renoncement à l’objet maternel, qui est le premier objet de l’enfant et comme marquant le début de la période de latence et de la formation du Surmoi chez le garçon. Des auteurs postérieurs à Sigmund Freud, comme Melanie Klein ou Donald Winnicott par exemple, ont cependant compris le Surmoi comme instance bien plus précoce. Le cas de la petite fille est cependant différent à ce stade : elle interprète en effet la castration comme ayant eu lieu, n’étant pas en possession d’un pénis, et se doit donc de la réparer. Ce moment, l’envie du pénis, marque alors l’entrée dans l’Œdipe à rebours du cas masculin. Le meurtre du Père primitif est ainsi le fantasme universel de l’humanité de tuer la figure paternelle castratrice, seule étape permettant un développement psychique normal par la suite. « La notion complète du complexe d’Œdipe comporte en effet ces trois éléments : désir incestueux à l’égard de la mère, désir de tuer le père, et image d’un père cruel et castrateur » explique Henri F. Ellenberger.

Enfin, en dépit de l’importance du concept en psychanalyse, jamais Freud ne lui a pour autant consacré un ouvrage spécifique, même s’il revient sur cette découverte dans son dernier ouvrage, L’Abrégé de psychanalyse, en écrivant : « Je m’autorise à penser que si la psychanalyse n’avait à son actif que la seule découverte du complexe d’Œdipe refoulé, cela suffirait à la faire ranger parmi les précieuses acquisitions nouvelles du genre humain »

Selon Freud, tel qu’il le décrit dans son essai « L’Organisation génitale infantile » (1923), l’élaboration du complexe d’Œdipe représente une étape constitutive du développement psychique des enfants. Le désir envers la mère trouve en effet son origine dès les premiers jours de la vie et conditionne toute sa psychogenèse. La mère est, d’une part, la « nourricière », et, d’autre part, celle qui procure du plaisir sensuel, via le contact avec le sein et à travers les soins corporels. L’enfant, qu’il soit fille ou garçon, en fait donc le premier objet d’amour qui restera déterminant pour toute la vie amoureuse. Cette relation objectale est ainsi investie de sexualité. Cet amour d’objet se déploie donc en cinq « phases » libidinales. La notion de « phase » ou de « stade » n’est pas à prendre au sens littéral. Elle signale la primauté d’une zone érogène particulière mais n’implique pas que le processus se déroule de manière mécanique et linéaire. Tout au plus peut-on admettre qu’une phase succède à l’autre dans l’ordre décrit. Le complexe d’Œdipe se déploie donc à travers ces phases en fonction de leurs propriétés propres qui s’enchevêtrent pour constituer un agrégat de pulsions, nommé « complexe » d’Œdipe qui, pour les freudiens, trouve son apogée vers l’âge de 5 ans. Freud aboutit à cette déduction en étudiant le cas dit du « petit Hans ».
La « phase orale » constitue l’organisation psychique du premier lien. La nourriture qui passe par la bouche est en effet la première origine de sensualité. Le plaisir produit par les zones érogènes s’étaye sur ce lien vital puis s’en éloigne, par exemple lors des préliminaires sexuels des adultes. On différencie la « phase orale de succion » de la « phase orale de morsure » qui inaugure une manifestation d’agressivité reposant sur l’ambivalence inhérente à la relation d’objet. Pour les kleiniens, le complexe d’Œdipe se manifeste déjà à cette phase orale et son déclin intervient lors de l’avènement de la position dépressive. Ensuite, la « phase anale », allant de 1 à 3 ans environ, est liée au plaisir de contrôler ses voies d’excrétion. « La phase phallique » (ou « génitale infantile »), de 3 à 6 ans environ, est liée à la masturbation. Elle connaît l’émergence puis le conflit œdipien dans sa phase la plus aiguë. La « phase de latence » s’étale ensuite de 6 ans à la pré-adolescence, et correspond au déclin du complexe d’Œdipe par le refoulement des pulsions sexuelles qui sont mises au service de la connaissance (ou « épistémophilie ») qui dure jusqu’à l’adolescence et qui est permise par le processus de sublimation. Là encore, il faut considérer que ce déclin, cette « latence » est toute relative et peut varier selon les individus, les circonstances et les moments du développement. Jacques Lacan distingue quant à lui trois phases, l’œdipe permettant l’accès au symbolique : d’abord l’enfant est l’objet du désir de la mère, à savoir le phallus puis il perd cet avantage par l’interdit de l’inceste, édicté par le père, dès lors l’enfant perd sa relation fusionnelle et privilégiée avec sa mère par une castration symbolique. Enfin l’enfant assume le nom du père et s’identifie à lui.
Le déclin du complexe d’Œdipe correspond à la phase finale de la dynamique œdipienne. Il est marqué par le renoncement progressif à posséder l’objet libidinal, sous la double pression de l’angoisse de castration chez le garçon et de la peur de perdre la mère chez la fille. Plusieurs processus permettent en effet à l’enfant de détourner son attention libidinale des objets parentaux. Les déplacements identificatoires, les sublimations notamment, le transfert aussi, permettent à la libido de trouver d’autres objets de satisfaction, en particulier dans la socialisation progressive et dans l’investissement des processus intellectuels. Enfin, la « phase génitale » survient pendant l’adolescence et correspond à la reconnaissance de la « double différence, des sexes et des générations » et coïncide avec la seconde période de maturation sexuelle. Dès lors l’équilibre est trouvé, au sein d’une organisation génitale adulte et grâce aux changements d’objets devenus possibles : le désir sera donc adressé à une autre femme que la mère, à un autre homme que le père.

Il existe également, note Freud, une forme « inversée » du complexe d’Œdipe. La forme normale du complexe est en effet appelée « positive », à l’opposée de laquelle existe une forme négative appelée inversée. Le garçon voit dans son père non une figure à tuer psychiquement, mais l’objet de ses tendances sexuelles. Le père devient dès lors féminisé. Chez la fille, le schéma existe, se construisant a contrario sur la mère, investie des pulsions sexuelles objectivées. Selon Freud, les deux formes de l’Œdipe constituent le « complexe d’Œdipe complet ».
Selon Freud, lors du complexe d’Œdipe le Moi suit une profonde modification, de laquelle résulte le Surmoi ; « Le Surmoi est donc l’héritier du complexe d’Œdipe » explique Tran-Thong. En effet la résolution du complexe entraîne l’introjection de l’image du père. L’édification du Surmoi chez un individu dépend ainsi de la façon dont il a résolu son complexe d’Œdipe. De manière générale, « le conflit œdipien constitue un moteur essentiel du jeu des identifications par lesquelles se construit la personne » explique Roger Perron.

Pour Jacques Lacan le concept de « Noms-du-Père » envisage une situation œdipienne précoce, reformulant la vision freudienne du complexe d’Œdipe. Par cette formalisation structurelle, la nature et la fonction du père sont comprises sous l’angle symbolique. Cette métaphore paternelle prend notamment sens dans la théorie lacanienne de la psychose. Elle structure le symbolique et permet le passage de l’Œdipe. Au final, elle joue un rôle dans la constitution du langage chez l’enfan
L’Œdipe subit un « refoulement rapide », note Freud, mais, « du fond de l’inconscient, il exerce encore une action importante et durable. Il constitue dès lors le « complexe central » de chaque névrose ». Freud parle également, de manière synonymique, et dans un cadre psychopathologique, dès 1908, de « complexe nucléaire ». Tout d’abord, d’une façon passive, le complexe conditionne le développement ultérieur de l’enfant et par là celui de névroses ; d’autre part l’enfant, dès sa soumission au complexe, tente de comprendre afin d’aménager la réalité et il produit pour cela des « théories sexuelles infantiles » sur ses parents. Ses théories influent de manière décisive sur le caractère ultérieur de l’enfant et sur sa constitution névrotique. Néanmoins la névrose ne passe de virtuelle à actuelle que lorsque l’enfant est incapable de détacher sa libido des modèles parentaux. Dès lors il ne peut jouer de rôle social et produit un aménagement de la réalité, une névrose. Toute l’entreprise analytique se définit comme une éducation progressive pour surmonter ces « résidus infantile
Dès sa formalisation, Freud savait que ce modèle était difficile à transposer complètement pour le développement des petites filles. Il a essayé de pallier cette difficulté en aménageant le concept de l’Œdipe pour la fille, que le psychiatre et psychanalyste Carl Gustav Jung appelle par la suite le « complexe d’Électre ». Il la définit comme la tendance compulsive amenant la fille à se tourner vers le père ou une autre image paternelle de substitution et qui est conséquence du complexe de castration pré-pubertaire féminin. Si Freud admet l’existence d’un « complexe d’Œdipe au féminin », il ne lui reconnaît pas une équivalence stricte avec celui dédié au petit garçon. Ce « monisme phallique » postulé par Freud a en effet soulevé de vives protestations, du vivant même du fondateur de la psychanalyse, et en particulier de la part de femmes psychanalystes, comme Ruth Mack Brunswick, Helene Deutsch, Karen Horney ou Melanie Klein. Cette extension au sexe féminin n’a cependant jamais été totalement satisfaisante et aujourd’hui rares sont les analystes qui utilisent ce terme. Freud remarque, dès le début, en 1916 : « On ne saurait dire que le monde fût reconnaissant à la recherche psychanalytique pour sa découverte du complexe d’Œdipe. Cette découverte avait, au contraire, provoqué la résistance la plus acharnée »] et ce même au sein de la théorie psychanalytique. La psychanalyste Mélanie Klein par exemple, afin d’équilibrer le concept, a insisté sur le fait que le garçon « envie » le pouvoir des femmes de donner la vie autant que la fille pourrait « envier » le phallus.

Les conséquences du déclin du complexe d’Œdipe sont différentes d’un sexe à l’autre : d’abord il s’agit du renoncement au premier objet d’amour dans les deux sexes. Le garçon se détournera de sa mère pour d’autres femmes mais la fille va elle s’orienter vers un objet d’amour hétérosexuel (le père duquel elle devra aussi se détourner pour d’autres hommes). Dans ce strict cadre intrapsychique, les psychanalystes considèrent que l’homosexualité est un avatar du complexe d’Œdipe. Le garçon se fixe au père, la fille à la mère par impossibilité d’intégrer l’angoisse de castration ou, sa conséquence, l’intégration de la double différence. En psychanalyse le « choix d’objet » est inconscient et il n’a rien à voir avec ce qu’on pourrait entendre par un choix d’orientation sexuelle qui serait, lui, conscient ou même délibéré. La confusion entre ces deux champs a motivé nombre de débats reposant sur une incompréhension totale. En 1953, Jacques Lacan tente lui aussi de dépasser le déséquilibre de la théorie œdipienne concernant les filles en interprétant l’Œdipe comme fonction : le père intervient en tant que loi venant rompre la fusion entre la mère et son enfant, fille ou garçon.
Ainsi que l’explique Freud, l’Œdipe est précédé de deux phases où prédominent successivement les zones érogènes, d’abord celle orale puis celle anale, et dans lesquelles s’organisent les premières relations objectales. L’Œdipe ne serait donc pas premier, mais serait lui-même originaire, ce sur quoi Freud lui-même achoppait. Pour Melanie Klein, il existerait ainsi un « complexe d’Œdipe précoce », qu’elle décrit en 1927, et antérieur à l’âge de 3 ans et prenant son origine dans les fantasmes de la petite enfance. Les résidus archaïques, ressentis comme bons ou mauvais par l’enfant sont ainsi associés aux figures parentales. Dans la même ligne, Otto Fenichel, en 1931, postule également des « précurseurs du complexe d’Œdipe ».

Le psychanalyste Claude Le Guen, dans L’Œdipe originaire (1974), a par ailleurs décrit un « œdipe originaire » correspondant à une première structure triangulaire mettant en jeu le sujet naissant, sa mère et un tiers qui suscite une peur de l’étranger qui expliquerait, au 8e mois chez l’enfant, un tel sentiment pour l’Autre. Un autre psychanalyste, André Green a ainsi poursuivi et complété cette relation à trois actants. Enfin, il existe des organisations non œdipiennes, étudiées de longue date par la psychanalyse, et qui donc remettent en cause partiellement l’universalité du complexe. Ainsi, le vaste champ des structures perverses, des autismes, des psychoses enfin, infantiles ou adultes a été pris comme preuve pour récuser sa centralité dans la constitution de la personnalité. Un autre psychanalyste français, Michel Fain, développe quant à lui la notion de « censure de l’amante », qui rend compte du lien privilégié qui unit la mère à l’enfant et ce avant la constitution de l’Œdipe. Cette relation aboutirait à constituer chez l’enfant un imaginaire fantasmatique qui conditionne ensuite la relation triangulaire œdipienne.
Depuis les débuts de la psychanalyse jusqu’à ses développements les plus récents, le complexe d’Œdipe a été critiqué. Le psychanalyste Otto Rank le range ainsi derrière le traumatisme de la naissance, alors que le psychiatre Carl Gustav Jung en refuse la primauté. Le désir de la mère dans la vision jungienne n’est en effet pas relatif à l’inceste et n’est pas restreint au seul complexe d’Œdipe[. D'autres l'ont ramené à un principe moral limité à la bonne société viennoise, émanant de l'état d'esprit de Freud lui-même alors que Heinz Kohut l'a minimisé au sein de ses théories sur le narcissisme. Il reste avec l'inconscient et les théories sur la sexualité infantile, une des pierres d'achoppement à la fois entre psychanalystes et entre ces derniers et leurs opposants plus ou moins radicaux.

L'ethnologue français Claude Lévi-Strauss dresse une critique culturaliste de l'universalité du complexe d'Œdipe, tout en reconnaissant que le tabou de l'inceste est commun à tous les peuples.L'universalité de ce complexe, par-delà les différences culturelles, a fait très tôt l'objet de critiques d'ethnologues. Ainsi, l'école culturaliste (Bronisław Malinowski, Margaret Mead et Ruth Benedict) est en opposition directe avec le postulat freudien. Le premier à émettre de telles critiques est Malinowski, à partir d’un programme d'étude mené après la Première Guerre mondiale sur les mœurs sexuelles en Mélanésie, et qu'il synthétise dans son ouvrage La Sexualité et sa répression dans les sociétés primitives (1921). Son observation des populations des îles Trobriand révèle en effet une configuration socio-culturelle qui, fondée sur un mode de parenté matrilinéaire, n’a rien à voir avec celle de la civilisation européenne. Or, puisque le complexe d'Œdipe tel que le décrit Freud suppose une identité entre le père biologique (avec lequel la mère échange un amour que l'enfant jalouse) et la figure autoritaire (qui s'interpose entre l'enfant et la mère), la notion de complexe d'Œdipe semble indissociable d'une forme familiale précise, dite « nucléaire », où le père, la mère et les enfants vivent sous le même toit et dans laquelle le père biologique exerce l'autorité sur l'enfant. Aussi, et contrairement au postulat de Freud, cette forme d'organisation familiale n'a-t-elle rien d'universel selon Malinowsky : dans de nombreuses cultures, le dépositaire de l'autorité vis-à-vis de l'enfant n'est pas le père mais est par exemple l'oncle maternel dans les îles Trobriand. De là découle une fragilisation de l'édifice freudien, où il apparaît comme une hérésie de dissocier le partenaire sexuel de la mère de la figure exerçant l'autorité sur l'enfant. La critique ethnologique est cependant à nuancer car Claude Lévi-Strauss, dans son ouvrage Les Structures élémentaires de la parenté (1949), soutient en effet que la prohibition de l'inceste est au fondement de toutes les cultures humaines. Pour l'approche psychanalytique, l'existence d'un tel tabou cadre parfaitement avec l'Œdipe.

Les travaux de Malinowski sont contestés par Géza Róheim, qui entame en 1928 un voyage de quatre ans en Somalie et en Australie, à l'issue duquel il conclut à l’universalité du complexe d’Œdipe dans son article « Psychanalyse des cultures primitives », repris en 1950 dans son ouvrage Psychanalyse et anthropologie, publié ensuite sous le titre Psychanalyse des cultures primitives (1932). Cependant, la façon dont Róheim procède est fortement critiquée par le psychanalyste Wilhelm Reich, dans un appendice qu’il ajoute en 1934 à son livre L'Irruption de la morale sexuelle. Wilhelm Reich lui reproche son manque de rigueur ethnographique et d’avoir inféré gratuitement certaines conclusions à partir de l’étude de rêves d’autochtones peu coopératifs. Il accuse surtout le caractère prédéterminé du projet de Róheim. C’est l'ambition de prouver l’universalité de l'Œdipe qui lui en a fait voir les manifestations partout selon Wilhelm Reich. Ces reproches furent aussi adressés à Ernest Jones, qui tenta de défendre le point de vue de Róheim mais en vain, et sans avoir au préalable intégré, lui non plus, les données ethnographiques.
Dans Mythe et tragédie en Grèce ancienne l'historien et anthropologue français, spécialiste de la Grèce antique, Jean-Pierre Vernant dénonce les contresens et l'anachronisme de l'interprétation psychanalytique du mythe grec ainsi que dans un article de 1967 intitulé « Œdipe sans complexe »[6]. Pour Vernant, Freud synthétise le mythe en un schéma par trop simplificateur. Il n’inscrit pas non le mythe d’Œdipe dans la mythologie grecque dans son ensemble. Le raisonnement freudien est donc selon lui un « cercle vicieux », principalement parce que Freud interprète le mythe grec avec une mentalité contemporaine, sans effectuer un travail de contextualisation historique.
L’ethnologue Claude Lévi-Strauss, pour sa part, trouve pour le moins abusif que Freud fonde l’essentiel de la psychologie humaine sur une « pièce de théâtre de Sophocle », pièce n’ayant pas par ailleurs le côté de mythe fondateur de l’esprit européen (l’individu s’opposant à la Cité), qu’est sa tragédie Antigone. Dans son ouvrage La Potière jalouse (1985), il rédige donc une « contre-explication » parodique où il fait dériver toute cette psychologie d’une pièce d’Eugène Labiche, Un chapeau de paille d’Italie. Cet essai qualifié de « plaisant, mais rigoureux » a été mentionné par plusieurs auteurs, dont Michel Serres, comme étant l’une des critiques les plus constructives de la psychanalyse.
Œdipe (à droite) et le Sphinx (au milieu) accompagnés du dieu Hermès (à gauche).Dans Folies à Plusieurs (2002) l’historien des psychothérapies Mikkel Borch-Jacobsen souligne que Freud affirme sa théorie œdipienne de façon parfaitement arbitraire, en dehors de tout matériel clinique (si ce n’est celui, particulièrement suspect, fourni par son autoanalyse), afin de trouver une explication ad hoc aux constants récits de séduction paternelle de ses patients. Selon Borch-Jacobsen, ces récits ne sont pas dus à un quelconque œdipe décelé chez les sujets analysés, mais bien plutôt aux suggestions induites par les croyances de Freud lui-même à propos de l’étiologie sexuelle des névroses et des psychoses.
Dans L’Anti-Œdipe, paru en 1972, le philosophe Gilles Deleuze et le psychanalyste Félix Guattari définissent le désir comme une puissance d’invention, et la psychanalyse comme étant, malgré elle, une entreprise de répression des forces créatives de l’inconscient et de celles potentiellement révolutionnaires du désir, œuvrant à la conservation de l’ordre politique et socia. Le complexe d’Œdipe n’est pas, pour Deleuze et Guattari, la forme inconsciente véritable du désir, mais la forme que l’institution psychanalytique impose, via la cure psychanalytique, au désir de ses patients, et en particulier de l’institution bourgeoise et patriarcale. Ils expliquent en quoi le complexe d’Œdipe, loin pour eux de constituer une vérité sur le désir, est un moyen pour les psychanalystes de modeler et de contenir ce dernier, en le réduisant à la structure familiale, pour l’empêcher de se répandre dans le champ social et d’y mettre en œuvre sa puissance révolutionnaire.

De manière générale, la question de la validité du complexe d’Œdipe continue de nourrir un vif débat dans le contexte social actuel, qui voit se développer en Occident des formes nouvelles de la famille (en particulier la monoparentalité, la famille adoptive, la famille recomposée, l’homoparentalité). De nombreux psychanalystes tentent d’aménager la notion théorique de complexe d’Œdipe aux cas de figure où l’autorité paternelle s’avère absente, intermittente, ou partagée entre plusieurs pères. Se fondant sur la notion d’« entitlement » créée par Freud, le psychanalyste Arnold Rothstein explique par exemple que des enfants en souffrance nourrissent l’illusion d’être toujours en symbiose avec leur mère. Ces cas psychopathologiques semblent ne pas s’inscrire dans le schéma œdipien. Par ailleurs, au sein des Gender Studies, la féministe américaine Judith Butler, tout en reconnaissant l’apport freudien, critique l’unilatéralité sexuelle du complexe d’Œdipe. Dans son ouvrage Gender Trouble (1990) elle critique la conception freudienne d’une bisexualité sans véritable homosexualité telle qu’elle est présentée dans Le moi et le ça.
Remarques :
Ces propos ne sont que des vulgarisations banales, largement divulguées au grand public. Je ne pense pas avoir jusqu’ici trahi de grands secrets. Je me suis fait « l’écho de la rumeur ambiante ». Je resterais très discrète à l’égard de mes propres points de vue, à ce sujet, qui bien-sûr, vous le comprenez bien, feront l’objet de la rédaction d’un ouvrage personnel ultérieurement compte tenu des virulentes et violentes réactions venant du corps enseignant auquel je réserve un article personnel, pétri de théories et d’expériences de terrain et où le centre de mes investigations se portera sur « L’enfant en proie et aux prises à l’enseignement en France » .
Chantal POULAIN ( Paris, décembre 2010)

Oedipe

Dimanche 2 mai 2010

Freud about Freud

Jeudi 1 avril 2010

Sigmund Freud et la Psychanalyse

Jeudi 1 avril 2010

Carl Gustav Jung

Jeudi 1 avril 2010

Sigmund Freud

Jeudi 1 avril 2010

La Femme  » psychanalytique »….

Jeudi 1 avril 2010

SEXUALITE FEMININE

La perplexité que l’on éprouve lorsque l’on se trouve face à la complexité du problème de la sexualité féminine tient, sans doute, à la diversité des approches possibles.
Les réflexions anatomique et génétique sur la différenciation sexuelle, les recherches sur l’embryon, portant sur l’origine d’une sexualité humaine, les découvertes de la physiologie à l’égard du sexe chromosomique et ses différences d’avec le sexe hormonal, la multitude des études faites de la biochimie à la médecine, produisent constamment des théories nouvelles, qui, à côté des élaborations conceptuelles issues des sciences humaines, tentent d’apporter une explication aux mystères de la vie pulsionnelle: la bisexualité de l’embryon n’a-t-elle pas son pendant sur le versant psychologique ?
L’hormone mâle ne serait-elle pas déterminante pour nous éclairer sur les origines du comportement sexuel masculin?
Les transformations du métabolisme féminin ne seraient-elles pas à la source de son attirance pour des objectifs passifs et du refoulement de ses instincts agressifs?
La psychanalyse s’intéresse à toutes les questions se rattachant à ce problème: l’énigme du désir chez la femme, la nécessité d’être désirée, l’impact de la différence anatomique des sexes sur le psychisme féminin…
Mais concernant les multiples conceptions médicales, leurs liens, on observe que la fonction sexuelle ne prend de sens que par rapport au Désir qui déclenche la pulsion. Pourtant Sigmund Freud, à l’issue de ses travaux, confiera que l’élucidation de la problématique de la sexualité féminine reste: « une tâche irréalisable »
La raison qu’il donne est la suivante:
 » Lorsque nous avons étudié les premières configurations psychiques que prend la vie sexuelle chez l’enfant, nous avons pris pour objet l’enfant de sexe masculin. Nous pensions qu’il doit en aller de même pour les petites filles, quoique, d’une certaine manière, différemment. On ne pouvait alors clairement constater où se révèle cette différence au cours du développement. »
Par ailleurs, les psychanalystes étaient le plus souvent des hommes, mais il apparaît, d’après les analystes femmes, qu’il y aurait quelque chose d’impossible à interpréter, concernant la femme.
Parmi elles, nous pouvons évoquer les travaux de Lou Andreas-Salomé, psychanalyste, intellectuelle, qui réalisa un parcours téméraire au sein de la modernité européenne: femme originale intégrée aux milieux littéraires cosmopolites, elle aura sa place, dès 1911, dans l’avènement de la psychanalyse.
L’histoire de cette femme est aussi celle d’une émancipation féminine.
Dans ses oeuvres littéraires, elle réaménage les traumatismes du passé, et va toujours dans le sens d’une indépendance.
Elle réussit à vivre librement ses relations amoureuses et sexuelles, alors que dans son couple avec Friedrich Carl Andreas, elle s’était longtemps refusée ce plaisir charnel.
Dans sa recherche existentielle, Lou Andreas-Salomé se crée sa propre philosophie de la vie, analysant l’art, l’amour, l’érotisme, la femme ( comme porteuse de vie, de désir et d’une maternité spirituelle ) .
Elle écrira:
 » La sexualité rayonne, au-delà de l’union charnelle et de la vie donnée, dans les sphères de la création artistique et de la religion  » .
Luce Trigaray a marqué son époque, et s’est essentiellement penchée sur le problème de la Féminité et l’articulation de la différence sexuelle.
Elle dit:
« Pourtant la femme ça parle. Mais pas pareil, pas même, pas identique à soi, ni à un x quelconque. »
ou encore:
 » La femme ne peut donc pas s’entendre. Et, si tout ce qu’elle dit est de quelque manière du langage, il ne le signifie pas pour autant  » .
et enfin:
 » La femme ne parle jamais pareil. Ce qu’elle émet est fluent, fluctuant, Flouant. Et on ne l’écoute pas, sauf à y perdre le sens ( du ) propre. D’où les résistances à cette voix qui déborde le sujet « .
Une autre psychanalyste s’est interrogée sur la sexualité dite normale par rapport à une normativité, il s’agit de Joyce Mac Dougall.
On ne peut définir un être par un acte, même s’il s’agit d’un acte symptôme, car ce symptôme peut correspondre à des structures différentes « .
Cette analyste conteste le terme  » pervers  » et introduit l’idée que la sexualité perverse n’est que l’expression d’une situation intérieure où s’entrecroisent angoisses, dépression, symptômes psychosomatiques et inhibitions.
Intéressants, sont aussi les travaux de Piera Aulagnier et Nathalie Saltzmann à ce sujet.

CONCEPTIONS FREUDIENNES
D’un point de vue psychanalytique, la sexualité repose sur la libido, force pulsionnelle sexuelle.
Selon Freud, elle est indifférenciée, il n’existerait pas de « libido féminine ». Il soutient le thèse d’un « monisme sexuel phallique »jusqu’à la puberté. Le clitoris est associé au pénis en tant qu’organe érotique. La petite fille ne découvrirait le vagin que plus tard.
La phase clitoridiennes pourrait cependant marquer la femme toute sa vie.
Pour devenir une femme, selon Freud, la fillette doit traverser des expériences douloureuses, qui lui demandent une élaboration psychique intense.
C’est avant la puberté que la petite fille devra dépasser deux situations, qui lui sont propres, et que le garçon ne rencontre jamais.
Les enfants des deux sexes franchissent les premiers stades de la libido de façon sensiblement égale.
Ces stades prégénitaux, participent à l’organisation libidinale et correspondent au développement affectif de l’enfant.
Les stades oral, anal, phallique se succèdent ainsi que les zones érogènes qui leur sont associées.
Jusque-là, tout reste immature. Ces phases composent l’humain, et l’apprêtent à devenir un être géniteur.
Les zones érogènes se définissent nettement, et la masturbation clitoridienne devient préférentielle.
Mais au fur et à mesure que la féminité apparaît, le sensibilité du clitoris devrait devenir moins forte que celle du vagin.
C’est en cela que réside la première complication que la fillette doit surmonter par rapport au garçon, qui lui, prolongera cette activité sexuelle au cours de sa maturité.
La sensibilité érotique phallique du petit garçon se développera tout au long de sa vie d’homme, alors que pour devenir femme, un changement, à ce niveau, doit advenir chez la fillette.
Jacques André, psychanalyste et professeur à l’Université Paris VII, s’est lui aussi, intéressé à cette évolution.
La deuxième différence et difficulté qui se trouve sur les chemins de la fillette à destination de la féminité, est la mutation d’objet d’amour.
Le garçon ne connaîtra jamais ce bouleversement.
En effet, la mère est le premier objet d’amour, aussi bien pour le garçon que pour la petite fille.
Elle satisfait les besoins essentiels du nourrisson, avant l’Oedipe, elle est investie d’un pouvoir fabuleux.

Voici ce que Freud écrit à ce sujet:
 » Les sentiments libidinaux de la fille pour sa mère sont multiples et persistent pendant les trois stades de la sexualité infantile. Ils prennent le caractère de chacun d’eux en s’exprimant par des désirs oraux, sadiques anaux et phalliques. Ces désirs traduisent des émotions actives ou passives, et si on les rapportent à la différenciation ultérieure des sexes, on est en droit de les qualifier soit de virils, soit de féminins. En outre, étant ambivalents, ils sont à la fois tendres et agressivement hostiles. Il n’est pas facile de formuler en quoi consistent ces désirs sexuels. Le plus nettement perceptible est le désir de faire un enfant à la mère et d’en avoir un d’elle. Ces deux désirs datent de la période phallique et leur surprenante présence est prouvée, de façon formelle, dans l’observation psychanalytique. »
On parle même de fantasme de séduction par la mère, sans doute en raison des soins corporels donnés par la mère à la petite fille et qui suscitèrent les premiers émois sensuels génitaux.
La fillette doit cependant renoncer à cet attachement passionné à la mère, pour se tourner vers le père.
Cet arrachement se fait dans la douleur, souvent sous forme d’agressivité, de haine et de reproches.
Cette révolte peut parfois durer toute la vie, les reproches portent sur le manque d’amour de la mère : la mère n’a pas assez de lait pour nourrir le bébé.

D’autres fois, c’est la venue d’un autre enfant qui fait l’objet de la condamnation de la mère. La jalousie haineuse anime la petite fille, elle se sent abandonnée.
L’intensité des sentiments des enfants est sans limite, ils sont possessifs, et leur amour passionné est exclusif
En fonction des stades de la libido, les désirs sexuels de le petite fille se transforment. Malheureusement, ils ne peuvent être comblés.
Face à cette frustration des désirs non satisfaits, l’enfant développerait une agressivité à l’égard de la mère, la rendant responsable de cette frustration.
La rupture décisive se produirait à la phase phallique, au moment où la mère interdirait la masturbation à la petite fille.
Souvent la mère condamne, menace l’activité sexuelle de l’enfant qui finit par se
détacher définitivement, renonçant à cette forte fixation à la mère.
 » On pourrait penser, note Freud, que ces motifs suffisent à expliquer pourquoi la fillette se détache de la mère: la nature même de la sexualité infantile, l’excès des exigences amoureuses, l’impossibilité de satisfaire les désirs sexuels,
voilà ce qui provoque inéluctablement cette volte-face. On peut penser que ce lien est appelé à disparaître, du fait, justement, qu’il est le premier, car les investissements objectaux précoces sont toujours extrêmement ambivalents et l’amour puissant ne manque jamais de s’accompagner d’une forte tendance agressive. Les déceptions amoureuses, les renoncements seront d’autant plus sensibles à l’enfant, qu’il aura aimé avec plus de passion. Finalement l’hostilité accumulée doit l’emporter sur l’amour. On peut, aussi, nier l’ambivalence primitive, des investissements amoureux et démontrer que l’irrémédiable disparition de l’amour infantile est due à la nature particulière du rapport mère-enfant, l’éducation la plus indulgente ne pouvant qu’exercer une contrainte. Toute atteinte à sa liberté provoque, chez
l’enfant, une réaction qui se manifeste par une tendance à la révolte et à l’agression ».
Mais cette thèse ne peut être soutenue si on considère que le petit garçon connaît les mêmes sentiments hostiles et négatifs à l’égard de sa mère et reste cependant attaché à son premier objet d’amour.
C’est l’angoisse de castration qui reste l’élément spécifique chez la fille et qui agit comme facteur déterminant au détachement maternel.
Vers l’âge de 2 ou 3 ans, découvrant la différence des sexes, la petite fille en veut à sa mère de ne pas l’avoir dotée d’un pénis.
Pour le garçon, l’angoisse de castration est vécue différemment: en voyant le sexe féminin, il en arrive à penser que le pénis n’est pas forcément un élément du corps humain.
Lui reviennent à l’esprit les menaces proférées à l’époque de sa masturbation et craint la mise en actes de ces intimidations.
L’effroi éprouvé à l’idée de cette castration deviendra, à partir de ce moment-là, un ressort puissant pour le développement ultérieur du petit garçon.
Le retentissement de l’angoisse de castration pour la petite fille sera fondamental pour son évolution .

La situation n’est pas toujours facile à accepter, certaines petites filles caressent l’illusion d’avoir un jour un pénis.
Ce désir peut rester graver dans l’inconscient, ne jamais quitter la fillette devenue adulte, et la mener à entreprendre une analyse.
L’expérience de la castration représente pour la petite fille l’entrée dans la féminité, mais c’est aussi l’origine des névroses et des perversions.
A partir de la découverte de la différence des sexes plusieurs possibilités s’offrent à la fillette.
Ou bien elle s’orientera vers une féminité normale.
Ou bien elle s’engagera sur les chemins de la névrose en réagissant à la castration par l’inhibition sexuelle.
Ou bien on assistera à un changement dans son caractère, et elle développera un complexe de virilité.
Dans l’éventualité d’une féminité normale, lorsque l’enfant , à l’issue de la phase phallique, n’a pas trop endigué ses pulsions sexuelles, les transformations opérées doivent concourir à une organisation normale de la féminité.
Une poussée de passivité envahit la petite fille qui se sent, naturellement, attirée par son père.
Symboliquement, cet enfant tiendrait lieu de « penisersatz »:
On remarque que même lorsque la féminité s’est bien épanouie, ce désir de pénis survit chez la femme.
Ce désir de pénis ne correspondrait-il pas, s’interroge Freud, à  » un élément typiquement féminin ? « .
Au cours de cette période, c’est-à-dire, vers trois ans, la petite fille, découvrant son désir d’enfant et de pénis du père, va commencer à vivre l’Oedipe, éprouvant à l’égard de la mère des sentiments agressifs liés à la situation de rivalité.
Elle entre en compétition avec elle, jalouse de ce que le père lui accorde.
Elle aimerait prendre sa place pour jouir des faveurs dont son père la gratifie.
La situation Oedipienne est pour la fille l’issue d’une série d’épreuves douloureuses et d’un lent développement.
Cette phase est pour elle une sorte de répit passager.
Dans la deuxième situation, contestant l’évidence de la castration, la fillette déploie  » un complexe de virilité ».
N’abandonnant pas leur activité clitoridienne, elles prennent des attitudes de garçons et tentent de s’identifier à une mère phallique ou au père.

Freud explique, entre autre, ainsi l’origine de l’homosexualité.
Mais d’autres psychanalystes ont pu observer, dans leur pratique, que l’homosexualité n’était pas une conséquence directe du complexe de castration.
Certaines fois la fillette vit l’Oedipe avec son père, mais ne le surmonte’ pas et régresse jusqu’au complexe de virilité.
L’étude des couples homosexuels nous indique qu’ils jouent soit à la mère et l’enfant, soit au mari et à l’épouse.
Ce sont les traces laissées par la traversée de ces deux phases de l’évolution de la sexualité féminine.
Dans le troisième cas, l’enfant, souffrant d’une blessure narcissique à travers ce qu’elle peut vivre comme une « mutilation » et « une infortune singulière et privée », va d’une part abandonner le plaisir de la masturbation, refoulant certaines de ses pulsions sexuelles.
Un bouleversement intérieur violent est à l’ oeuvre, permettant à la petite fille de mener un combat contre ses penchants sexuels masturbatoires.
Du point de vue psychanalytique, on comprend fort bien les conséquences que peuvent revêtir la pratique ou l’abstinence de la masturbation précoce et le comportement des parents ceci en lien avec l’apparition d’une névrose et la formation du caractère.
L’abandon de la masturbation clitoridienne correspond au renoncement de l’activité phallique.

Finalement la petite fille prend conscience qu’elle n’est pas seule à être ainsi constituée; d’autres individus féminins, sa mère en particulier, sont ainsi faits.
Cela lui pose un problème car elle imaginait une mère phallique, toute puissante, à qui elle vouait un amour infini.
Mais cette mère tant aimée, admirée, apparaît soudain dépréciée, il lui manque quelque chose.
A ce moment-là, le garçon comme la fille, repositionnent leur désir.
Confronté au manque, l’enfant peut se trouver, parfois, dans l’incapacité de désirer l’objet, dévalorisé à ses yeux.
C’est ainsi que prennent naissance « névroses et perversions ».
Le complexe d’Oedipe et le complexe de castration sont liés différemment, suivant qu’il s’agisse de la fille ou du garçon.
Lorsque le garçon commence à éprouver du désir pour sa mère, et à vouloir éliminer son père, devenu rival, il se trouve au stade phallique.
C’est l’angoisse de castration qui va mettre un terme à ses tendances amoureuses, car il a peur de voir disparaître son pénis.
L’angoisse de castration, chez le garçon aboutit au déclin du complexe d’Oedipe.

S’identifiant à son père, le garçon va intégrer « l’interdit de l’inceste ».
Ainsi , aucune menace ne pèse plus sur son pénis.
A l’inverse, l’angoisse de castration précipite la fille dans l’Oedipe.
Le désir du pénis l’attire vers son père.
Le développement de son « surmoi » tiendra plus aux réactions extérieures, l’éducation et dépendra surtout de sa peur d’un retrait d’amour.
C’est à partir de l’Oedipe que la féminité va lentement se déployer.
Entre 6 et 9 ans, elle vivra l’acmé de la relation triangulaire Oedipienne, fantasmant sur le désir d’enfant avec le père et ses envies de meurtre à l’encontre de sa mère.
Cependant, elle essaie de lui ressembler pour séduire le père.
Ce violent conflit cessera lorsqu’elle prendra conscience d’une incompatibilité entre son vagin et le sexe de son père.
Cela produit une »angoisse de viol » à laquelle elle mettra fin en abandonnant son désir du pénis paternel.
Ses pulsions génitales sont sublimées.
Il faudra attendre la puberté, pour qu’elle se détache complètement du père, et s’intéresse à des garçons de son âge.
Au moment de la puberté, vers 10 à 12 ans, la fillette doit surmonter une étape délicate liée à l’importance de l’image chez l’adolescent.
Les seins apparaissent, le cycle menstruel s’instaure et cette phase inscrit un tournant essentiel dans l’instauration de la féminité de l’enfant.
La jeune adolescente commence à se maquiller, à se vêtir de façon parfois originale et provocatrice.
Elle désire prendre l’aspect d’une femme pour solliciter les garçons, les attirer.
En abandonnant l’illusion d’une possible relation incestueuse, la fille s’ouvrira sur le monde et commencera à entretenir une vie sociale.
Cette période, au cours de laquelle les parents sont délaissés, et ne représentent plus réellement d’intérêt pour l’adolescente, peut être ponctuée d’incidences dépressives: la jeune fille peut être en proie à  » des pulsions de mort’, avoir des idées de suicide, en adoptant, parfois, certains comportements mortifères.
C’est aussi le temps de la masturbation de la puberté émaillée de fantasmes de viol et de rapt, jusqu’au jour de la première relation sexuelle avec un garçon.
Si le premier acte sexuel se passe bien, le processus de féminité aboutira à des orgasmes de plus en plus variés et profonds: orgasmes vaginaux et plus intimement orgasmes utéro-annexiels.
La jeune fille jettera son dévolu sur un époux correspondant à son idéal narcissique: c’est-à-dire un idéal masculin qu’elle aurait voulu atteindre, dans l’enfance, et auquel elle aurait voulu ressembler.

Si la phase oedipienne n’a pas été correctement dépassée, elle s’orientera vers un homme qui représente l’image du père.
On constate donc que l’évolution affective et le choix narcissique vont jouer un rôle capital dans le choix objectal.
Le besoin d’être aimée est pour la femme plus important que le besoin d’aimer.
La femme se réalisera aussi dans la maternité.
Selon Freud, la relation mère-enfant est le lien le plus extraordinaire et le plus cristallin.
Mais , toujours selon lui, c’est dans la relation « de mère à fils »que la femme s’épanouit le mieux et puise un bonheur parfait.
Il en tire la conclusion que « le manque de pénis » est toujours à l’ oeuvre.
Si la première expérience sexuelle se déroule mal ( manque de tendresse, mauvais choix), la jeune fille peut être traumatisée, souffrir d’une blessure narcissique et vivre l’acte comme un viol.

POINTS DE VUE LACANIENS
Jacques Lacan s’est intéressé à la conception de l’évolution de la sexualité en mettant l’accent sur le désir en rapport avec le désir de l’Autre.
Il s’est beaucoup appuyé sur les travaux de Mélanie Klein concernant la relation primordiale mère-enfant.
Les études de cette psychanalyste ont apporté un éclairage différent sur les relations précoces du bébé, cannibaliques et divisées ( morcellement ), avec les objets extérieurs, partiels, des « morceaux de mère ( ses mains, ses seins, les objets qu’elle manipule et nomme) ».
Mélanie Klein introduit l’idée de deux catégories d’objets: « les bons » et les « mauvais ».
Selon elle, l’angoisse de séparation et de perte d’objet s’inscrit dans sa conception des relations objectales et de sa théorie de l’angoisse.
Pour elle, l’angoisse est une réaction directe au travail interne de la pulsion de mort.
Il y aurait, selon Mélanie Klein, une angoisse persécutrice de l’ordre de la position paranoïde-schinoïde et une angoisse qui appartiendrait à la posture dépressive.
H.Segal ( 1979) précise:
 » L’angoisse fondamentale postulée par Freud concernant la perte d’objet pouvait être vécue selon Mélanie Klein sur l’un ou l’autre mode ou bien encore selon une quelconque combinaison des deux. »

Par exemple, l’objet est méchant et attaque, il persécute et est mauvais, car il se présente sous un mode paranoïde, et il reste bon, sur le mode dépressif, car on a peur, on éprouve de l’angoisse à l’idée de perdre le bon objet.
La première angoisse chez l’enfant décrite par Mélanie Klein, est la peur d’être anéanti par la pulsion de mort, elle est donc projetée à l’extérieur, d’où la notion de fantasme du mauvais objet et le bon objet protecteur est introjecté .
Les frustrations sont vécues comme des persécutions, les bonnes expériences se fondent dans le fantasme d’un objet idéal.
Dans ces chaos intérieurs, si le nourrisson est bien intégré, il peut avoir le souvenir d’un amour stable pour la mère aimée, qu’il se met à haïr quand elle disparaît.
La perte de l’objet reste cruelle, mais si l’amour concernant l’objet total, cela aura moins de conséquences sur le nourrisson.
En effet, les fluctuations entre l’angoisse de persécution, lorsque la haine est plus forte, et l’angoisse dépressive, lorsque l’amour l’emporte sur la haine, seront déterminantes.
Car la position dépressive marque un point capital entre le moment de fixation des psychoses et celui des névroses.
Selon Lacan, le monde est l’endroit où se localise le désir de l’Autre (lieu de
l’Inconscient, en opposition à l’autre qui correspond au terme de congénère, auquel on est confronté dans le cadre d’une relation interpersonnelle).

L’enfant devra faire l’expérience de la localisation de ce désir de l’Autre.
L’extérieur ne pouvant se restreindre à un site « bon » ou « mauvais ».
Le sein, objet partiel, initialement objet de besoin, va se transformer en GL parenthèse symbolique « de la mère réelle qui entoure le nourrisson et recèle dans son être tous les objets qu’elle peut contenir.
La mère est le premier objet symbolisé.
Suivant qu’elle apparaisse ou disparaisse ( le Fort/Da de Freud) elle se transformera, pour le sujet, non plus en objet de besoin, mais en objet d’amour.
Ainsi, la présence ou l’absence de la mère inscrira notamment l’enfant en tant que sujet désiré ou non, la question de la satisfaction des besoins reste en second plan.
C’est de la mère qu’émane ce Désir, si vital à l’enfant.
Ce qui est fondamental pour l’enfant, pour la petit fille, c’est ce qu’elle désire.
Elle va repérer son Désir dans celui de la mère ( l’Autre).
Le Désir se réfléchit, renvoie dans l’Autre, à un désir autre.
Au cours de la relation initiale mère-enfant, le nourrisson est très réceptif et décrypte les signaux provenant de la mère.
Le phallus, comme signifiant du désir se manifeste du côté de la mère.

Ceci induit un fond nouveau et occulte, un élément tiers.
La mère désire le Phallus, symbole de toutes les qualités attachées à l’organe masculin.
 » Car il faut un symbole à cette marge qui sépare tout être humain
de son désir. Le symbole du manque, nécessaire pour introduire son désir dans le signifiant, est le phallus. ( W. Granoff et F. Perrier).
C’est au moment où la petite fille va reconnaître son désir dans celui de sa mère que son évolution affective va s’enclencher.
Au cours de cette évolution, on distinguera trois phases capitales qui seront à l’origine du processus de mutation: on partira de l’imaginaire pour accéder au symbolique et à la réalité.
Dans un premier temps, le phallus, signifiant du désir, chemine conjointement dans la relation imaginaire avec la mère comme objet basique.
Ensuite, il prend sa place dans la triade symbolique avec la père, référence suprême, la mère s’en remettant à lui, en lui transmettant son rôle.
Ces profonds bouleversements sont couronnés par le complexe d’Oedipe.
Mais la fonction du Phallus ne peut être alors évaluée qu’au regard du complexe de castration.
Pour comprendre le processus de féminisation, il convient de faire un petit retour en arrière, au moment où la mère représente tout pour l’enfant et incarne le Désir.

Désir à la mère vont d’abord tenter de s’identifier à cet objet qui capte tant la mère et essayer d ‘être le Phallus.
Dans cette évolution psycho-affective, le désir maternel est déterminant. Il déclenche l’identification.
Cependant, l’enfant s’aperçoit rapidement que cela ne suffit pas, la mère n’est pas comblée, elle continue à désirer ailleurs.
L’enfant sent qu’il y a « autre chose « .
C’est alors que surgit dans son esprit l’idée d’un tiers auquel la mère se réfère et qui canalise son désir.
Il s’agit là du concept du « Nom du Père ».
L’enfant ne se découvre pas encore en tant qu’homme, mais plus au sens d’une  » référence à une Loi ».
Dans sa quête, l’enfant rencontre l’Autre, qui le renvoie à l’Autre de l’Autre, c’est-à-dire, « la Loi ».
La mère désirante induit une Loi autre, qui n’est pas la sienne, ni celle de l’enfant.
C’est dans le discours de la mère que le Père intervient pour  » interdire ».
Ce rôle « d’ interdicteur « , le père le joue à deux niveaux:
- d’une part, s’adressant à l’enfant, il lui notifie: » tu ne seras pas le phallus, objet du désir de ta mère ».
– d’autre part, à l’attention de la mère, il énonce:
« tu ne réincorporeras pas ton enfant pour en faire ton phallus ».
Voilà ce qui signe  » l’interdit de l’inceste ».
Rarement l’enfant s’accommode aisément de cette Loi interdictrice.
Souvent, il continue, pendant un temps, à entretenir l’identification avec ce phallus rival.
L’enfant a beaucoup de mal à admettre, que la toute-puissance de la mère dans laquelle il l’avait installée, puisse soudain disparaître et s’avérer être un mirage et que, par ailleurs, une différence des sexes vienne démentir l’autonomie désirante de la mère.
A cette  » étape phallique primitive » l’enfant est confronté au dilemme: « être ou ne pas être le phallus ».
Si la Loi du Père échoue, cela peut donner naissance à une névrose obsessionnelle ou une perversion .
Classiquement, on observe que, dans un premier mouvement, l’enfant refuse l’idée de ne pas être l’unique objet de désir de la mère et qu’elle puisse se heurter au manque.
Dans un second mouvement, il prend conscience de la réalité, réalisant que le sexe féminin est différent et que la mère connaît une jouissance à laquelle il n’a pas accès et qu’elle partage avec le père.
C’est à ce moment-là que l’enfant finit par renoncer à son identification au phallus.

physiquement constitué d’un « pénis réeravec lequel il peut gratifier la mère, se la réappropriant à travers ce don de pénis.
L’avènement de la féminité dépend, pour l’enfant, de la reconnaissance de la singularité du sexe féminin.
Il doit aussi prendre conscience que c’est précisément cette singularité qui déclenche le Désir du Père.
Il ne s’agit plus, alors, pour l’enfant, d’être ou de ne pas être le phallus mais de « l’avoir ».
Avec la découverte de la différence des sexes se manifeste le complexe de castration.
Cette période, décisive pour l’évolution l’enfant, atteste de la fugacité du phallus et de l’objet d’amour.
Il aimait une mère toute-puissante, phallique, elle est soudain destituée de son pouvoir quasi magique, et n’est plus qu’un objet de manque.
Tout ce qui la rendait désirable, à ses yeux, disparaît.
Un travail psychique important l’oblige à repositionner son désir par rapport au manque.
Pour la petite fille, ce manque est, en première instance, vécu comme une lésion corporelle, une blessure affreuse.
Elle fera l’impossible pour désavouer le caractère de non-retour de cette dissimilitude

Parfois, c’est à l’instar de jeux érotiques d’enfants, au cours desquels garçons et filles se donnent en spectacle, dévoilant leur nudité, qu’elle prend réellement conscience de l’aspect irrémédiable de la conjoncture sexuelle.
Fascinée par le corps du garçon, l’envie de pénis la tenaille, ce qui, selon Freud, signe l’emblème symptomatique de la féminité.
Il arrive, cependant, que la petite fille reste fixée à la zone érogène clitoridienne, à son désir de pénis ou à la mère.
Ces fixations sont source de troubles.
Les phobies, entre autres, proviennent des ces ancrages non surmontés.
Le désir du pénis n’est pas conscient, il s’exprime sous forme de phobies, dont l’objet s’aménage à partir d’une transposition de vecteur.
Lorsque ces phases sont dépassées, et que tout se déroule normalement, la petite fille, animée de l’envie de pénis, va trouver une issue avec le père.
Lors de l’Oedipe et du transfert au Père, on assiste à une transformation de désirs.
Le désir d’un enfant du Père affleure, remplaçant l’envie de pénis, tel que Freud l’avait observé.
Cette phase, reste pour la petite fille, la plus difficile à franchir.
Psychologiquement, les mutations sont considérables et mobilisent une énergie psychique intense.

Elle se tourne vers un autre Objet d’amour, de sexe différent.
Et elle rentre dans une ère de passivité, parfois proche du masochisme, loin des instincts agressifs.
Piera Aulagnier pense que c’est une traversée primordiale pour la femme, et sa relation à la féminité.
Dans sa revendication, voire récrimination du pénis à la mère, la petite fille n’acceptait pas sa féminité.
Alors que l’émergence de son désir d’enfant correspond à une convocation de libido et une sollicitation d’amour dont la destination est le père.
La féminité se réalise dans le cadre de cette renversements psychiques qui sont le témoignage que la dissemblance sexuelle qui tatoue la fille et la révèle . C’est ce qui provoque « le désir le la promesse de don » chez l’homme.
La fille dépend alors de l’homme et de ce que « il doit lui être donne’.
C’est sa manière de se réconforter, en proie à l’angoisse de castration.
Le manque qu’elle ne peut symboliser devient le fondement du désir.
Dans la cause du désir de l’homme réside l’indice de la femme.
La femme a besoin d’un homme pour être reconnue.
Elle ignore ce qui fait qu’elle puisse être désirée, seul l’homme peut le formuler.
La féminité reste un secret pour la femme. L’homme la désire, il peut la renseigner sur la nature de son désir.
Au coeur de sa féminité, elle trouve le manque.
En amour, ce manque devient une don.
Elle désire et offre ce qu’elle ne détient pas et suscite le désir de l’homme.

APPROCHE JUNGIENNE ET TEMPERANCES
Cari Gustav JUNG s’interrogea, tout au cours de sa vie, sur les mystères de la nature humaine.
Il pressentit que la vérité de l’individu se cachait en lui-même, que chacun recelait les clefs de sa propre énigme.
Se tournant vers la psychiatrie, il travailla aux côtés d’ Eugen Bleuler, au Burghôizli et poursuivit des recherches, dans le cadre de sa thèse, sur  » La psychopathologie des phénomènes dits occultes ».
De sa rencontre avec Sigmund Freud naquit une profonde mais éphémère amitié.
Des désaccords théoriques concernant, entre autres, la conception de la libido, contribuèrent à la séparation de ces deux psychanalystes.
Seul, Carl Gustav JUNG traversa une crise troublante, au cours de laquelle « une confrontation avec l’inconscient » s’imposa.
Ceci fut le début d’une phase d’investigations aventureuses, pénibles qui déboucha sur l’inauguration d’une harmonie nouvelle basée sur la communication entre la conscience et l’inconscient.
C’est alors l’entrée définitive, pour Carl Gustav JUNG, dans un monde d’innovations et de découvertes.
Il dira un jour, à propos de cette phase douloureuse de maturation qu’elle fut: « la matière première de l’ oeuvre de ma vie ».

Elaborant une théorie de la structure de la psyché, Jung a une conception très dynamique de l’homme ( Werden / Wandlung).
Les rêves représentent pour lui comme pour Freud  » la voie royale vers l’inconscient », et « traduit un état de l’inconscient à un moment donne’.
C’est avec le concept « d’inconscient collectif’ que Carl Gustav JUNG « s’enhardit », sur le plan théorique, par rapport à Sigmund FREUD.
Cet inconscient collectif s’exprime à travers les  » archétypes », que l’on pourrait définir comme des éléments primordiaux de la psyché humaine.
Ces structures préformées sont nourries par le flux de l’énergie psychique et se caractérisent par une dynamique particulière ; elles s’extériorisent de façons diverses et mouvantes, sous la forme  » d’images archétypiques ».
C’est dans ce contexte, qu’à côté des images parentales, apparaissent deux archétypes que je désire analyser de plus près parce qu’ils peuvent avoir une incidence dans la vie du couple: « l’anima et l’animas »
Ils représentent la polarité sexuelle complémentaire de l’individu.
Selon la théorie élaborée par Cari Gustav Jung, la femme aurait en elle une partie masculine inconsciente: l’animus.
Ce terme signifie souffle, vent, esprit.
L’animus de la femme s’est forgé au fil de ses expériences masculines, et peut prendre les traits du père, du frère.
Fondamentalement on peut dire que l’animus est influencé par le père de la femme.

On peut le repérer, par exemple, sous forme de convictions cachées et « sacrées ».
On voit alors une femme s’exprimer d’une voix forte, virile, tentant de faire accepter ce type de convictions, même par la force, ayant parfois recours à la violence. On sent quelque chose de dur, d’intraitable, d’entêté.
Même chez une femme très féminine on rencontre un obstacle infranchissable, froid. Un des thèmes de l’animus serait:
« La seule chose que je désire au monde, c’est d’être aimée, et il ne m’aime pas.  »
Ou encore:
« Il n’y a que deux issues à cette situation et elles sont également mauvaises ».
Ces idées  » vraies  » lorsqu’elles sont prises dans un contexte général, ne sont pas adaptées à la situation particulière de la femme, mais on peut les discuter, elles viennent du père.
Tout comme l’anima chez l’homme, que nous étudierons plus loin, l’animus peut devenir  » le démon de la mort ».
Un animus négatif peut entraîner la femme vers des désirs, des jugements sur le monde  » tel qu’il devrait être », l’empêchant de nouer de véritables liens avec la réalité et la vie active qui la feraient exister réellement.
C’est alors la mort, comme dans ce conte tzigane, où l’animus négatif est représenté.
 » un bel étranger est accueilli par une femme solitaire, bien qu’un rêve l’ait avertie que cet homme est le roi des morts. Et au bout d’un certain temps, elle le presse de lui révéler qui il est en réalité. Il refuse d’abord en disant qu’elle en mourra. Elle insiste, et brusquement, il lui révèle qu’il est la mort elle-même. L
femme meurt aussitôt de peur ».
Mais l’animus négatif, c’est aussi  » le voleur ou le meurtrier  » dans les légendes. C’est Barbe-bleue qui assassine secrètement ses femmes.
Il représente toutes les pensées destructrices, froides, dont la femme peut être en proie. Les sentiments positifs n’existent plus, elle manigance de sombres projets, souhaitant la mort d’autrui.
Lorsque cette forme d’animus est à l’ oeuvre chez la femme, elle peut provoquer la mort dans son entourage, pousser l’époux vers le suicide, les enfants vers la maladie. La femme peut être  » possédée » pendant un temps, par cet animus négatif, qui la plonge dans des ruminations morbides, dans une grande insécurité psychique, et la dépouillant de tous sentiments humains.
Lorsqu’elle parvient à sortir de cette torpeur, elle se rend compte que sa réalité intérieure et que le monde extérieur sont différents de ce qu’elle croyait fermement.
Mais l’animus peut être très précieux quand il est positif.
Il établit alors des liens avec le Soi, par le biais d’une activité créatrice.
Le rêve d’une femme de quarante-cinq ans illustre cet aspect de l’animus:
 » Deux silhouettes voilées grimpent sur le balcon et pénètrent dans la maison. Elles sont enveloppées de manteaux noirs à cagoule et semblent vouloir nous tourmenter, ma soeur et moi. Ma soeur se cache sous le lit, mais les personnages en cagoule l’en chassent avec un balai et la mettent à la torture. Puis c’est mon tour. Celle de deux silhouettes qui commande me pousse contre le mur et fait des gestes magiques devant mon visage. Entre temps, l’autre dessine quelque chose sur le mur, et quand je le vois, je dis pour les amadouer :  » Oh que c’est bien dessiné! « . Mon tortionnaire a soudain le visage noble d’un artiste, et dit
fièrement : « Oui, vraiment « , et commence à nettoyer ses lunettes.  »
La femme était habituée au sadisme des personnages, car elle était souvent victime de crises d’angoisse au cours desquelles elle s’imaginait que ceux qu’elle aimait allaient disparaître, souffraient, ou bien se trouvaient en danger.
Ici l’animus est représenté par deux personnages, on peut alors penser que les malfaiteurs matérialisent un facteur psychique à double effet.
Dans la vie de la rêveuse, la soeur, très artiste, était morte jeune, sans avoir pu exprimer longtemps son talent.
Par la suite, dans le rêve, on apprend que les voleurs en cagoule sont en fait des artistes masqués, cachés.
En interprétant ce rêve, on voit que les attaques de panique trahissent un danger réel et mortel, mais en même temps l’éventualité d’une activité créatrice.
Si elle se laisse guider par le message du rêve, en développant son talent de peintre, l’animus persécuteur se métamorphosera en activité créatrice bénéfique.
L’animus peut se manifester sous la forme d’un groupe et prend un caractère collectif. Les femmes concernées disent alors  » on « , ou bien  » ils « ,  » tout le monde », insistant sur : » toujours »,  » il faudrait », « on doit ».
L’intégration de l’animus à la conscience est un processus long, ardu,
douloureux, si mais la femme y accorde du temps, de la réflexion, elle se dégagera des influences inconsciente négatives et sera en mesure de se confronter à la réalité.
Cette aventure intérieure est symbolisée dans certains contes et mythes, où le prince, changé en monstre, ou en animal sauvage par une sorcière, ne peut être sauvé que par l’amour d’une jeune fille (  » La Belle et La Bête  » ).

Souvent elle ne doit rien connaître de lui, ni même son visage mais lui accorder toute sa confiance, l’aimer aveuglément pour qu’il retrouve son identité initiale.
Mais c’est à l’issue d’une série de péripéties compliquées, difficiles, empreintes de maux et d’afflictions que l’héroïne finit par délivrer le prince.
C’est alors que l’animus intégré devient un allié précieux.
Il dotera la femme de qualités masculines, comme  » l’initiative, le courage, l’objectivité et la sagesse spirituelle. »
Comme l’anima, que l’on analysera plus tard, on retrouve quatre stades de développement de l’animus.
Dans un premier temps il peut prendre l’apparence d’un athlète, représentant la force physique.
Puis, au deuxième niveau, c’est l’esprit d’initiative, et la qualité de pouvoir organiser l’action.
Au troisième stade, il s’agit du  » verbe « , il est personnifié par un professeur, un prêtre.
Enfin, au quatrième degré, l’animus, à son stade le plus élevé, correspond à la  » Pensée « .
Il donne à la femme une fermeté spirituelle, joue un rôle de soutien.
Parfois il permet à la femme de se mettre en relation avec l’évolution spirituelle de son temps et de développer une profonde sensibilité aux pensées créatrices.

Ces personnages intérieurs importants, inconscients, complémentaires, sont primordiaux, la femme doit aussi savoir accueillir  » l’homme intérieur ».
Il lui faut en prendre conscience et faire sienne cette image archétypique.
L’anima pour l’homme et l’animus pour la femme sont essentiels, car ils créent l’image du sexe opposé dans la psyché consciente, petit à petit, au moment de la phase de séparation d’avec les parents.
C’est au moment de l’adolescence, répétition de l’Oedipe, que se joue la période la plus importante de l’individu, par rapport aux imagos parentales.
A ce sujet, on peut noter que le divergences théoriques apparurent progressivement entre Freud et Jung, sur des points fondamentaux.
En, 1912, la publication de la deuxième partie du grand livre de Jung  » Métamorphoses et symboles de la libido » précisent ces différences de points de vues dont Freud a conscience.
Jung élargit le concept de  » libido » ( sorte de tension générale), sa spécificité sexuelle s’estompe et tend à faire de l’Oedipe un symbole et une métaphore supérieures. Si Freud considère d’Oedipe par rapport au père, Jung l’envisage par rapport à la mère.
Pour Jung, le mot  » Sphinx » éveille l’idée de secrets et de mystères. Il pose aussi des énigmes comme le Sphinx d’Oedipe, mais ce serait une représentation de l’imago maternelle,  » la mère terrible et dévorante ».
En répondant au Sphinx, Oedipe est précipité dans un inceste matriarcal.
Le Sphinx est l’enfant d’Echidna, être mixte, jolie Jeune femme par le haut, et serpent affreux par le bas.

Cet être double correspond à l’image de la mère, moitié humaine et digne d’être aimée, moitié monstrueuse et terrifiante.
A ce sujet, on peut évoquer les propos de Freud qui a toujours eu du mal à  » être une mère dans le transfert  » .
Quant à l’analyse des rêves, même si les deux hommes se passionnèrent pour ce sujet, elle reste chez Jung une tentative d’appréhension du  » Tout « .
Pour lui, le rêve est une voie ouverte sur  » L’univers cosmique « , préexistante à l’homme et demeurant après lui.
Dans  » L’interprétation des rêves  » Freud essaie de décrypter la pathologie de la névrose à travers le rêve, dégageant les pensées latentes et inconscientes en deçà de la perception dans laquelle s’origine la représentation.
Jung développe un rapport singulier au Sacré que l’on ne trouve pas chez Freud. Cette relation au Sacré provoquerait chez l’homme le sentiment de  » numineux « . A ce sujet, il écrit:
 » La numinosité est totalement soustraite à la volonté consciente, car elle met le sujet dans un état de saisissement  » ( Ergriffenheit ).
Cette notion est un Intensitâtfaktor émotionnel ou énergétique et présuppose la croyance en la religion, et l’expérience de la rencontre avec le divin.
Freud a un tout autre rapport à Dieu et à la religion.
( article inachevé )

Pierrot

Dimanche 28 mars 2010